samedi 30 avril 2011

Grand quintuor en ut majeur

 


Schubert String Quintet in C II Adagio Part 1 

8 janvier


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Lire  le contenu   de  l’article  suffit  pourtant  à  montrer  à  quel  paroxysme  d’émotion  pouvait  se situer   Elena  . Paul  Bakura   Skoda   l’auteur  de l’analyse   semblait   avoir  pénétré  l’œuvre  de Schubert  avec sensibilité semblable à la sienne  mais  avec   une  finesse, une  compétence  ,  une  profondeur  qu’elle  ne pouvait  que  lui envier  .
Bakura Skoda , n’avait  pas  hésité à  porter l’œuvre  au somment  de  l’ art  musical et  affirmait  ce qu’elle  se plaisait   à  mettre  en  avant   ,  ce qu’elle  avait  reconnu  elle-même  dans le  compositeur,  sa  vitalité  et  son  énergie  dépassant  la  vision  tragique   de  la plus   intense  des  douleurs , de la mort  ou   d’un  amour  déçu  ,  ou encore  des   cruautés  de l’existence  .  Cette   absence  de  résignation  lui  semblait  pour  elle  une  leçon  de  vie   plus clairement  exprimée  que  toute  expression  philosophique  .
 Mais  comme  Badura Skoda  ,  elle    ressentait  l’intensité  de  l’adagio dans  sa  description  de  la  douleur  de  l’abandon  , son  cri  dans le   désarroi de  la  séparation  , l’impuissance   de   l’amant  délaissé : une  phrase  poignante  semble  crier  »pourquoi  m’as-tu  abandonné ?-"
 

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Article  de   Bakura Skoda pour  l’Edition  du   grand  quintuor 
  en  ut,  par Arcana  Charlotte  et  Michel Bernstein  editeurs  .

Franz Schubert
Le quintette en  ut  majeur, opus 163,D 956
(un essai  de Paul  Badura- Skoda )

Ceux  qui  apprécient ce morceau  musical, se  réjouiront   sans  doute   tout autant que moi  de  cette  analyse apologétique :
« «  Le quintette en  ut  majeur  est l’une  des  plus grandes  œuvres de  la  musique occidentale.  La perfection de sa forme, la profondeur  de  son  message, la beauté de  la sonorité  des  cordes et sa  richesse mélodique en  font un sommet  de  la création  Schubertienne. Seul celui qui  a  entrevu l’autre  rive  du  Styx, le fleuve qui enserre le  royaume  des morts peut  créer  une œuvre  d’une  telle portée. C’est Schubert le  mystique qui  s’y  révèle, apparenté aux poètes et  aux mystiques de Silésie, le pays des ancêtres  du  musicien, ceux qui  comme  Jacob  Böhme ou Angelus Silesius , avaient   une seconde  vision .  Mais  cette œuvre  ne se  détourne en  aucun  cas du  monde,  elle n’est pas morbide, elle  est  au contraire  pleine  de  vitalité.

On  peut  remarquer  à quel  point nombre  de  commentateurs ressentent d’une  façon  analogue cet  au-delà  insaisissable. «   Ce que Schubert dans l’Adagio  du  Quintette ,  rend  sensible  et inclut  dans le temps, c’est une  expérience anticipée  de   la mort, c’est un coup  d’œil  de  visionnaire sur  cette  autre  rive,  qu’i  a  si  souvent  invoquée  dans  ses  Lieder ».
Mais  ce n’est pas la mélodie infinie, supraterrestre  de l’Adagio qui  imprègne  l’auditeur d’une  façon  indélébile, mais le  second  thème si  parfait et  si  simple  du  premier  mouvement . C’est  certainement  ce  thème , qui  semble  reposer  en  lui-même, qui  fit  dire  à  un grand interprète de  notre  époque : «  Quand   viendra l’heure  de ma mort , c’est le  quintette  de Schubert que je souhaite entendre ».  La  douce  oscillation de  ce  thème, sa  courbe , ne sont  qu’une halte,  une  vision  de la paix . Avant , et  surtout  après, le premier mouvement se  déroule d’une  façon  dramatique dans une structure majestueuse  et gigantesque.


Le  deuxième mouvement, un Adagio  dans la  tonalité mystique, de  mi  majeur, est le  mouvement lent  le  plus vaste que  Schubert  n’ait  jamais  composé . La mélodie infinie (2 fois  14 mesures) est  donnée au second  violon, nimbée  d’un  jeu  de  formules  et  d’interjections, au  premier  violon  et au  deuxième violoncelle. Brusquement  cette  vision  céleste  d’une   nuit  étoilée est  brisée  par l’irruption  de   la  partie  centrale. C’est  comme  si  une douleur  épouvantable, cherchant  à  s’extérioriser  et ne pouvant  s’apaiser, ébranlait  au  plus profond de  son  âme  celui qui  se laissait  aller à  cette paisible  vision.  Une  phrase  poignant  qui ne  cesse  de  revenir  semble  crier : » Pourquoi  m’as-tu  abandonné ». Bien  entendu  un  tel  ébranlement  ne  peut  rester  sans efet   le motif  éruptif  de la partie  centrale   vibre  en  écho, comme  un tressaillement  souterrain, , lors de la  reprise  de la partie ne  mi  majeur, pour se  décharger , tout  à  fait  à  la fin, encore une  fois dans un fortissimo  en  fa mineur qui ,  par  une modulation  magique (1)  se  dissout  enfin  dans un  mi  majeur pp . la paix  est  retrouvée.

Le troisième  mouvement    Scherzo se  démarque  radicalement  du  monde rêveur  de l’Adagio :L’énergie  y fuse  .  Il  anticipe en même  temps le  scherzo  de  le   4ème  symphonie  de Bruckner. Mais là  où   Bruckner , selon  ses propres  termes,  décrit une halte  de  chasseurs dans la forêt ,, pour  Schubert  , c’est une  descente aux enfers,, non  dans l’Inferno  de Dante,  mais dans le  royaume  de la mort  de la tradition juive, celui  des ombres ,  le  nadir.  La  manière  dont   Schubert présente  cette  vision  donne   au  sens  propre  le frisson. Partant  d’un  fa mineur  apparent, des passages   unisono descendants   conduisent à  une cadence plagale en  ré  bémol  majeur. L’impression  de chute  sans fin  est  remplacée  dans la  seconde parie  du  trio  par  un nouvel  abaissement  des  degrés  de la cadence .. . s’y  ajoute  une  dynamique typiquement  Schubertienne : ppp suivi  d’un diminuendo  sur  4  mesures , ce qui  conduit  là  où  il n’y a   vraiment plus de  substance. Je ne connais rien  de  comparable  dans toute  la  littérature  musicale, des classiques aux modernes  Mais avec  ce sol  est  atteinte la dominante de  la tonalité de  base do  majeur ;  8  mesures  crescendo suffisent pour  quitter  cette  vision  de la mort et revenir  à  la vie avec  la  reprise  du  Scherzo.

Le plus  grand miracle  de  cette  œuvre  est peut être  que  Schubert  soit  arrivé  à  composer un fial  digne  de  ces trois  premiers mouvements gigantesques  où  toute  mesure explose.  …..[…]
Et  là  comme il  serait insensé  de  rivaliser  avec  la mélodie  sublime  du  début, ce mouvement  se  concentre  sur  l’élément  rythmique, dansant,  où  la formule « bref-bref-long » tient le premier  role. Le second  thème  lui  dans sa tonalité normale de  sol  majeur, apporte  à  l’œuvre une ambiance  encore  inouïe :  la joie  de  vivre   , simple et  spontanée Il  n’est pas  faux  de parler ici  d’une  bienheureuse ivresse à la viennoise ….
Et  c’est précisément  dans ce  thème  léger que le  chant  des deux violoncelles évoque  toujours davantage le second  thème  du  premier  mouvement   . Dans le  même  temps, en  réaction  à  la joie  sensuelle   de  ce thème,  le  troisième  thème , tenu  doucement,  n’apporte  que les harmonies de  ses notes égales, sans aucun  motif  rythmique  , ce voile mystique plane  dans une pureté  et   une  beauté de  sonorité qui  dépasse  même  celle  du  second mouvement.  Après une reprise   en partie  variée  de  ces thèmes, la  coda  s’élève  à  une  dernière  extase Mais même  le  radieux do  majeur final  se  rappelle de la  relation en demi –ton des  deuxièmes et  troisième  mouvements les deux  dernières notes  sont  ré-bémol do et  il faut  certainement y  voir  un  geste  de  défi. (2)


1)suite  napolitaine dans  sa  variante mineur propre  à  Schubert  )
2)On est tenté ici  de citer  Beethoven ; » je veux saisir  le  destin à  a gorge »

(message édité le  29/4/2011, erreur  de   manip !! )

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