lundi 30 septembre 2013

Le Mahâbhârata., du film au livre ....

Comme  le papillon  autour  de    la lampe  je  tourne  autour  de   l'Inde ! Peut être ai-je  peur  de  me brûler les ailes à sa spiritualité  !
Sincèrement  je   crois qu'il  est très  difficile   d’appréhender  seul  cette  culture foisonnante  et je n'ignore pas le risque  de  confusions   ou  de  contre-sens  à force de  raccourcis trop  rapides  ou  d'analogies  superficielles. Pourtant par sa richesse elle  exerce  sur  notre  esprit  occidental   une sorte de  fascination  et   pour  cette  raison  je   ne peux  renoncer à  mes tentatives . Je prie donc à l'avance  les spécialistes  de  m'excuser  de très possibles erreurs et  recommande   aux moins initiés   de procéder à leur  propre vérification en explorant d'autres points de vue.
Ceci étant dit   ne   nous privons  pas  du plaisir  d'emprunter  les chemins qu'ont pris les plus anciens textes de l'humanité  pour parvenir jusqu'à nous , qu'ils soient   poétiques  ,  légendaires , religieux ou philosophiques , qui   au gré du temps  se sont  chargés des  nouvelles couleurs posées  par    les  générations successives les relayant  jusqu'à notre  présent.
Cette fois j'ai  choisi  comme porte pour  entrer  dans  cet univers    l'adaptation  cinématographique  de  Peter  Brook  du  Mahâbhârata.
L'adaptation  est  somptueuse  entre  théâtre et  chorégraphie avec  des  accents de  tragédie grecque  ..
La première impression   est  sans  doute dans la persistance  des  échos  de l'épopée  homérique,  dans la composition  , avec l'aède inspiré et  poète  tout d'abord  qui  transmet oralement son  récit  destiné  à  l'écrit et qui  se   substitue  au cours   de la narration   au chœur du théâtre antique , dans le sujet   également  qui est celui  d'une grande  épopée  relatant    la grande  bataille   opposant   Pandava et  Kaurava et à laquelle participent  les dieux.    Le déroulement  du  récit   frappe   ensuite  par  les   échos  avec nos propres mythes  Moïse,  Déluge, Œdipe  ,  Orphée etc  ......
Parti  pris  du  réalisateur   Peter  Brook , occidentalisation du légendaire indien  ?   Comment   échapper  à  la tentation  de ressortir la théorie  des origines  indo-européennes ? On est déjà  trop   familiers des phénomènes de recouvrement   , trop conscient  de l'amplitude   temporelle   .qui  mêle  sources  évènements  et  populations pour   poursuivre une seule piste  . La sagesse  serait-elle  dans   un strict   abandon  à  la poésie  ou  à la littérature   ?
Mais  dès  que   vous   prenez garde  aux  dialogues  la  curiosité devient   irrésistible. Les messages percent   bien  au-delà  de leur habillage   poétique  et   vous laissent  déconcertés  pour vous confondre dans votre ignorance où  l'incompréhension, avec un sens qui   vous échappe ou bouleverse   vos préjugés .
Sans  espoir de lever le voile  sur   la totalité du  mystère un besoin de référence au texte s'impose . Quelle  liberté  s'est autorisé  Peter  Brook  ?  Quel  est  son  degré de fidélité au  texte   ? Mon adhésion   à  son œuvre   mon admiration   pour le film  n'en sera pas   amoindrie ; ce film est    un chef d’œuvre . Mais   il  me donne  envie d'en savoir  plus.

A priori    , à défaut de  pouvoir  lire  en  anglais  et   plus encore  de ne   pas  être   apte à  déchiffrer le sanskrit ,  je devrai  me  contenter  d'extraits  ce qui  représente déjà   un  bon volume de 600 pages  environ  .
   .....
Le dvd  du film  de  Peter Brook



jeudi 26 septembre 2013

Spinoza . Réhabilitations des juifs portugais

Fantaisie de  l'histoire, de l'interaction  des  évènements , uchronie ou destin , de la cause  aux effets  , un bien  pour  un mal  , un  mal  pour  un bien   .?
Ce n'est peut être  pas une reflexion très sérieuse   ,  mais   on peut  s'interroger   sur  l'histoire  de  la  philosophie  occidentale   si  l'erreur  que nous   croyons devoir   aujourd'hui  corriger n'avait pas été commise  .Si la famille de  Espinosa  ,  n'avait  pas  été  expulsée   du  Portugal  ou   contrainte à  s'exiler  dans les  terres du nord  de l'empire  de Charles Quint fuyant l'inquisition dans la péninsule , si   Le jeune   Baruch  avait   menée une  existence  paisible   dans  la foi   hébraïque  au sein  de sa communauté juive  du Portugal ...
Spéculation  gratuite   !   mais  quand  elle touche  un de  nos plus grands penseurs   européens,  au  moins  agnostique ,  peut être  panthéiste , par cela  même  visionnaire , la question  peut  nous effleurer   ...

Article  de  Marie  Lemonnier  paru  dans  le  Nouvel  Observateur  de   septembre   2013   :

samedi 21 septembre 2013

Herem prononce en 1656 contre Spinoza

Rembrandt (détail) (1)
Les  fautes ou  manquements   reprochés  à   Spinoza  ne nous sont  toujours pas  connus  et gardent leur mystère .  Pourtant  la condamnation   prononcée  contre lui   par   les chefs de  sa communauté  fut  terrible  :

" Les   messieurs du  Mahamad vous font savoir   qu'ayant  été informés, depuis  quelques temps  des opinions  et  des  actes mauvais  de Baruch  de  Espinoza,  ils se sont  efforcés par différentes voies  et promesses  de le  détourner       de  ses mauvaises voies ;  et  que, ne   pouvant y porter  remède, recevant   en  revanche  ,  chaque jour  , de plus amples  iformations sur les  horribles hérésies qu'il pratiquat et  qu'il  enseignait et sur les  actes   monstrueux  qu'il  commettait,  ayant de  cela de nombreux témoins dignes de  foi  qui  déposèrent  et   témoignèrent sur tout  en présence  dudit Espinoza qui  a  été  reconnu  coupable;  Tout cela  ayant été examiné en présence  de  Messieurs les  rabbins, les  mMessieurs   du  Mahamad ont  décidé  ,  en  prenant  l'avis  des rabbins,  que   ledit  Espinoza  serait  exclu  et  rejeté    de  la nation  d'Israël  à la suite du   hérem que nous prononçons maintenant dans les termes   suivants :
Selon  le jugement  des  anges  ,  selon  le jugement  des saints,  nous excluons, rejetons, maudissons et  exécront Baruch  de Espinoza avec le  consentement   de  toute la sainte  communauté,  devant   nos Saints  Livres et  les 613  commandements  qui  y  sont   inscrits.  Qu'il   en  soit  comme le hérem   que  Josué  formula  à  l'encontre de  Jéricho, comme  la malédiction  qu'Elisée  jeta sur les  enfants et  comme   toutes les malédictions qui  sont  inscrites  dans a  Loi . Qu'il  soit maudit le jour, qu'il  soit  maudit  la nuit;  qu'il soit maudit pendant  son sommeil et qu'il  soit  maudit  pendant  qu'il  veille; qu'il  soit maudit  quand il  entre et  qu'il  soit maudit  quand il  sort.   Veuille A[donaï]* ne jamais lui pardonner. Veuille  A  [donaï] allumer   toute sa  colère  et  sa fureur et jeter  sur li  toutes les malédictions inscrites  dans le  livre  de la  Loi.  Qu'A[dona¨] efface son  nom   dans ce monde   et  à  tout jamais et  qu'il  le sépare  de  toutes les  tribus d'Israël en l'affligeant  de  toutes les    malédictions que  contient la  Loi.  Et  vous   qui restez  attachés  à   A[donaï] votre   Dieu , qu'il vous conserve en  vie.
Sachez que personne n'a le  droit  de communiquer avec lui ,  verbalement ou  par  écrit, ni de lui  accorder  aucune  faveur, ni de se trouver  avec lui   sous le même  toit ou  à  mondre  de  quatre  coudées, ni  de  lire  aucun  écrit  fait  ou  rédigé  par  lui ."
Acte  d'exclusion de  Spinoza  ,  27  juillet   1656
* Le Seigneur

Spinoza avait   24  ans   , il  quitta Amsterdam   , renonça   à  toute activité commerciale comme  l'aurait voulu   la tradition  familiale, cessa de se considérer  comme  juif  ,  prit  le métier  de polisseur  de lentilles  et  consacra sa vie   à l'écriture de sa  philosophie.   Il  n'enseigna  jamais , déclinant  les propositions  de l'  Université de  Heidelberg  et  ne   voyagea jamais. Il mourut à   45 ans  .

(1)  Selon la  tradition Spinoza jeune  aurait  inspiré Rembrandt  pour figurer  David dans   ce tableau  "David  jouant de la  harpe devant   Saül.

vendredi 20 septembre 2013

Baruch Spinoza , Comment vivre ?

portrait   , Ecole hollandaise  XVII°


L'expérience   m'ayant appris à reconnaitre  que  tous les évènements ordinaire de la vie commune  sont  choses  vaines et  futiles , et que tous les objets de  nos craintes  n'ont  rien  en  soi  de bon  ni de mauvais  et  ne prennent  ce caractère  qu'autant  que   l'âme en  est  touchée  ,  j'ai  pris enfin  la résolution de rechercher s'il  existe un  bien  véritable  et  capable  de  se  communiquer aux hommes,  un  bien  qui  puisse  remplir   seul  l'âme  tout   entière, après  qu'elle  a rejeté tous les  autres biens, en  un  mot  ,  un bien  qui  donne  à  l'Ame,  quand  elle le trouve et le possède,  l'éternel et  suprême  bonheur . [...]
Je méditais donc en  moi-même  sur  cette  question :  est-il   possible que je parvienne à  diriger ma vie  suivant une nouvelle règle, ou du  moins  à m'assurer qu'il  en  existe une, sans rien  changer  toutefois à  l'ordre actuel de ma conduite ,  ni  m'écarter  des habitudes  communes ?  (Traité  de la réforme de  l'entendement . Citation    par  André Scala  )

Toujours de  André Scala ... Les premiers  paragraphes du   "Traité de la réforme de l'entendement" ont  un  caractère  et  un style exceptionnels dans l'histoire  de la  philosophie. Écrits à  la première  personne, ils racontent une tragédie sans  faits précis ni  identifiables , où  intermittente d'abord, la vie philosophique  se constitue comme un  rythme continu ,  un  enchaînement  d'idées. La vie bonne ne peut être une  vie d'ignorance, la finalité est la  liberté humaine et  la  liberté humaine  est la puissance de comprendre ininterrompue.  On  y  apprend que  vivre libre ,  c'est ne rien  mépriser  du tout,  pas même les richesses  et les honneurs. A la lecture on s'étonne, car la vie  qui a produit  cela  apparait  inexplicable,  admirable , inventive comme celle  d'une plante qui,  avec peu  de lumière se crée " sa propre  joie  dans un sol  inhospitalier"...
Baruch Spinoza écrit   son " traité  sur la réforme  de l'entendement " à  29 ans vers  1660 -1661 Depuis  4 ans il  a été  exclu  de la synagogue  et  de la communauté  juive d'Amsterdam. Excommunié  il  ne peut  exercer  d'activité  activité commerciale .  Il   aurait pu enseigner  à  l'Université de  Heidelberg mais  il  a préféré  à la fois  quitter  Amsterdam pour s'installer  à Rijnsburg pour   y exercer   le métier  de   polisseur  de  lentilles  (les  sciences   de l'optique étaient alors en pleine  expansion  ).

mardi 17 septembre 2013

Véronique Gens: "Beau soir" by Claude Debussy

Paul Eluard : Pouvoir tout dire

Le tout est  de tout  dire  et je manque de mots
Et je manque de temps  et je manque  d'audace
Je rêve et je dévide au  hasard mes images
J'ai mal  vécu  et mal  appris à  parler  clair

Tout dire les rochers  la route et les pavés
Les rues et leurs passants les champs et les bergers
Le duvet du printemps la rouille de l'hiver
Le froid et la chaleur composant un seul  fruit

Je veux montrer la foule et chaque homme en  détail
Avec ce qui l'anime et qui le  désespère
Et sous ses  saisons d'homme  tout  ce qu'il éclaire
Son histoire et  son  sang son histoire  et sa  peine

Je veux montrer la foule  immense divisée
La foule cloisonnée  comme en  un cimetière
Et la foule plus forte que son  ombre impure
Ayant rompu ses murs  ayant  vaincu ses maîtres

La famille des mains  la famille des feuilles
Et l'animal  errant  sans personnalité
Le fleuve et la rosée  fécondants et  fertiles
La justice debout  le bonheur bien planté

Le bonheur d'un  enfant  saurai-je le  déduire
De sa  poupée  ou  de  sa balle ou du beau temps
Et le bonheur d'un homme  aurai-je  la vaillance
De le dire selon sa femme et ses enfants

Saurai-je mettre  au clair l'amour et  ses  raisons
Sa tragédie  de plomb sa  comédie  de paille
Les actes machinaux qui  le font  quotidien
Et les caresses  qui  le  rendent  éternel

Et pourrai-je jamais enchaîner la récolte
A l'engrais  comme  on fait  du bien  à la beauté
Pourrai-je comparer le  besoin  au désir
Et l'ordre mécanique  à  l'ordre  du  plaisir

Aurai-je assez de mots pour liquider la haine
Par la haine sous  l'aile  énorme des colères
Et  montrer la victime  écrasant les  bourreaux
Saurai-je colorer le mot révolution

L'or  libre  de  l'aurore  en  des  yeux sûrs d'eux-mêmes
Rien  n'est  semblable  tout  est neuf tout  est précieux
J'entends de petits mots devenir des adages
L'intelligence est  simple au-delà des  souffrances


Comment  saurai-je dire  à quel  point je suis contre
Les absurdes  manies que noue la solitude
J'ai failli en  mourir  sans pouvoir me  défendre
Comme en meurt un  héros ligoté  bâillonné

J'ai failli en  être dissous corps cœur   esprit
Sans formes et  aussi  avec toutes les formes
Dont on entoure pourriture  et  déchéance
Et complaisance et  guerre  indifférence  et  crime

Il s'en fallut de peu  que mes frères me  chassent
Je m'affirmais  sans  rien  comprendre à  leur  combat
Je croyais prendre  au  présent   plus qu'il ne possède
Mais je n'avais  aucune idée du  lendemain

Contre la fin de tout je dois ce que je suis
Aux hommes qui  ont su  ce que la vie  contient
A tous les  insurgés  vérifiant leurs outils
Et   vérifiant leur  cœur  et  se  serrant la main

Hommes continuement entre humains sans un pli
Un chant monte qui dit ce que toujours on dit
Ceux qui  dressaient notre  avenir contre la mort
Contre les souterrains de   nains et  des  déments.


Pourrai-je dire enfin la  porte s'est ouverte
De la cave où  les  fûts  mettaient   leur  masse sombre
Sur la vigne ou le  vin captive  le soleil
En employant les mots  de  vigneron lui-même

Les femmes sont  taillées comme l'eau ou  la pierre
Tendres ou trop  entières dures ou légères
Les oiseaux passent  au travers  d'autres espaces
Un chien  familier  traîne  en  quête d'un vieil  os

Minuit n'a plus d'écho  que pour un très vieil homme
Qui gâche son trésor  en  des chansons banales
Même  cette  heure  de la nuit  n'est  pas perdue
Je ne m'endormirai  que  si  d'autres  s'éveillent

Pourrai-je dire  rien  ne vaut que la jeunesse
En  montrant  le  sillon de l'âge  sur  la joue
Rien  ne  vaut  que  la suite infinie des  reflets
A partir  de l'élan des graines et  des fleurs

A partir  d'un mot franc et  des choses réelles
La confiance ira sans idée  de  retour
Je veux que l'on réponde  avant  que  l'on questionne
Et nul ne parlera  une langue  étrangère

Et  nul  n'aura envie de piétiner un toit
d'incendier  des villes  d'entasser  des morts
Car j'aurai  tous les mots qui  servent à  construire
Et qui font  croire  au temps comme à la seule source

Il faudra rire  mais on rira de  santé
On rira d'être  fraternel  à  tout  moment
On sera bon avec  les autres  comme  on  l'est
Avec soi-même  quand   on s'aime  d'être  aimé

Les frissons délicats feront place à  la houle
De la joie d'exister plus fraîche que la mer
Plus rien  ne   nous fera douter de ce poème
Que  j'écris  aujourd'hui pour effacer  hier .

Septembre  1950 Recueil  "dignes de  vivre  pouvoir  tout  dire"   Tchou Editeur

vendredi 13 septembre 2013

Odyssée de Pi


De  Ang Lee  :  sortie  en   2012

Une plongée  dans le merveilleux  : des images sublimes  (pour la plupart : images  de synthèse ) et une histoire  "réversible " , métaphore  ou fable qui  objectivement  pose   un bon nombre de questions pertinentes, d'abord évidemment  sur notre  potentiel  de  crédulité  au  premier  degré de l'histoire  . "Quelle  version  préférez-vous ? A quelle version   voulez-vous  croire "  car  c'est bien  de notre  volonté qu'il  s'agit  . La fiction  limite  la portée  de  l'enjeu    mais  combien  de  fois  saisissons-nous   le  moindre doute   pour   rejeter  une réalité  dérangeante  .
Plutôt que d'entamer  un longs  discours  sur   son  contenu philosophique que je vous laisse  le plaisir de découvrir et de juger  je préfère  vous faire  partager  quelques captures d'écran  à la hauteur  du  récit !

Répit  après une tempête  qui  a provoqué   le naufrage d'un  cargo et noyé  tous   ses passagers  , les  doux et  les  cruels , les hommes  et  les  animaux  ,  à l'exception ...

 d'un  jeune   indien  en  partance pour le  Canada et  de  quelques  animaux  du  zoo  embarqués  avec  lui ...dont un   tigre  du  Bengale  surnommé  Charlie  Parker   ,
 Impitoyable , la nature   réduira très  vite   les survivants  à  un  couple , le jeune   Pi, et  son tigre..






 ..De longs jours  de  solitude   commencent  pour les  naufragés contraints de partager   les  quelques   mètres  carrés   du canot  dérivant   dans l''immensité hostile  de  l'océan
 ; l'instinct  de  survie    émousse   les  griffes  du    tigre
 tandis que  Pi  entame   un  voyage initiatique et  subit   tel   Job de  la Bible   les épreuves que lui  inflige coup sur  coup un Dieu  absent   aux desseins   impénétrables  ....

 à égalité devant  la  mort  ...




  Quand tout  espoir  semble perdu :
 ...une ile dérivant   peuplée  de   suricates ..





 Ce paradis  n'est qu'un  leurre   ,  de quoi seulement reprendre   quelques  forces  et  ...devoir  choisir  de  continuer   ...
 Enfin sauvés   : l'ultime  séparation
 Sans un regard  en  arrière   Charlie  Parker  s'enfonce  dans la jungle   mexicaine ...



mardi 10 septembre 2013

Paul Eluard :La puissance de l'espoir


Autant parler pour   avouer mon sort :
Je n'ai  rien  mien,  on m'a dépossédé
Et les chemins  où  je  finirai  mort
Je les parcours en  esclave  courbé;
Seule ma peine  est ma propriété :
Larmes, sueurs, et  le  plus dur  effort.
Je ne suis plus  qu'un  objet  de pitié
Sinon de honte  aux yeux d'un  monde  fort.

J'ai de manger et  de boire l'envie
Autant  qu'un  autre à en perdre la tête;
J'ai de dormir l'ardente  nostalgie :
Dans la chaleur, sans  fin , comme une bête.
Je dors trop  peu , ne  fais  jamais la fête.
Jamais ne baise une  femme jolie ;
Pourtant  mon coeur vide   ,point ne   s'arrête,
Malgré douleur mon coeur   point   ne dévie.

J'aurais pu   vivre,  ivre  de mon caprice.
L'aurore en  moi pouvait  creuser  son  nid
Et rayonner subtile et protectrice,
Sur mes semblables qui  auraient  fleuri.
N'ayez pitié  ,  si  vous avez choisi
D'être bornés et  d'être  sans justice :
Un  jour  viendra  où  je  serai parmi
Les constructeurs d'un  vivant  édifice,
La foule ummense   où  l'homme est  un ami.

Du recueil :  "Digne  de  vivre  , pouvoir  tout  dire  " Tchou  Editeur

Ce  poème publié  le  28 novembre  1946 dans les "Lettres françaises",  était signé  du pseudonyme Didier  Desroches.  L'auteur  avait  voulu  échapper aux formes  d'écriture qui  lui sont  personnelles  .

samedi 7 septembre 2013

Amours avec Diderot et Fragonard

Fragonard :Baiser volé


"Le premier  serment   que se  firent   deux êtres de chair, ce fut au  pied d'un rocher qui  tombait  en poussière; Ils attestèrent de leur  constance un  ciel  qui n'est pas un  instant le  même ;  tout passait  en  eux et autour d'eux, et ils croyaient  leurs coeurs affranchis  des  vicissitudes. Ô enfants !  Toujours enfants ! ..." . Je ne sais de qui  sont   ces réflexions de  Jacques  , de son maître   ou de moi ;  il est  certain  qu'elles sont  de nous trois, et qu'elles  furent précédées  et  suivies  de beaucoup  d'autres [...] (Jacques le  fataliste  et son  maître)

On a dit  que l'amour  , qui  ôtait  l'esprit   à  ceux qui  en  avaient , en donnait  à ceux qui  n'en   avaient pas  .(Paradoxe du comédien)

Il y a un peu  de  testicule au fond  de nos  sentiments les plus sublimes et de notre tendresse  la  plus épurée. (Lettre à Damilaville)

Fragonard: le verrou
Et  puis,  lecteur, toujours des contes  d'amour; un,  deux,  trois ,  quatre contes d'amour qui  vous reviennent encore : ce sont  beaucoup  de contes  d'amour. Il est  vrai   d'un autre côté  que  puisqu'on écrit pour  vous, il faut ou  se passer  de votre applaudissement, ou vous servir à votre  goût, et  que vous l'avez bien  décidé  pour les  contes d'amour.  Toutes vos  nouvelles  , en vers   ou  en prose, sont  des contes  d'amour ; presque  tous  vos poèmes,  élégies,  églogues, idylles, chansons, épîtres,  comédies,  tragédies ,  opéras, sont  des contes d'amour pour toute nourriture depuis que vous existez, et  vous ne  vous en  lassez pas  .
(Jacques le fataliste et  son maitre )


(citations  extraites de : Esprit  de   Diderot  choix  de  citations   de   Laurent  Loty et   Eric Vanzieleghem )

vendredi 6 septembre 2013

Tristesse (Sibelius , valse triste)



Jean Sibelius, Valse Triste (orch.Herbert von Karajan)

L'expression  ( pour moi  ) la plus  juste de  la tristesse .
Ce n'est pas  du  drame ,  ce n'est pas  tragique   ,  même  pas vraiment mélancolique ...seulement triste . C'est lourd , pesant ,  ça vous écrase,  vous accroche à  la terre ,   vous attire au fond    , ça parle de résignation ,  d'espoirs  déçus , d'oublis, de contrées inaccessibles ...  de beaux rivages  entr'aperçus mais d'un rejet  définitf  au rythme  de cette valse-vague  qui   vous  maintient  au  large ....

mardi 3 septembre 2013

Paul Eluard



La courbe de tes yeux



La courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur,
Un rond de danse et de douceur,
Auréole du temps, berceau nocturne et sûr,
Et si je ne sais plus tout ce que j’ai vécu
C’est que tes yeux ne m’ont pas toujours vu.
Feuilles de jour et mousse de rosée,
Roseaux du vent, sourires parfumés,
Ailes couvrant le monde de lumière,
Bateaux chargés du ciel et de la mer,
Chasseurs des bruits et sources des couleurs,
Parfums éclos d’une couvée d’aurores
Qui gît toujours sur la paille des astres,
Comme le jour dépend de l’innocence
Le monde entier dépend de tes yeux purs
Et tout mon sang coule dans leurs regards.

 Capitale de la douleur, 1926

 Je t'aime
 

Je t’aime pour toutes les femmes
Que je n’ai pas connues
Je t’aime pour tout le temps
Où je n’ai pas vécu
Pour l’odeur du grand large
Et l’odeur du pain chaud
Pour la neige qui fond
Pour les premières fleurs
Pour les animaux purs
Que l’homme n’effraie pas
Je t’aime pour aimer
Je t’aime pour toutes les femmes
Que je n’aime pas
Qui me reflète sinon toi-même
Je me vois si peu
Sans toi je ne vois rien
Qu’une étendue déserte
Entre autrefois et aujourd’hui
Il y a eu toutes ces morts
Que j’ai franchies
Sur de la paille
Je n’ai pas pu percer
Le mur de mon miroir
Il m’a fallu apprendre
Mot par mot la vie
Comme on oublie
Je t’aime pour ta sagesse
Qui n’est pas la mienne
Pour la santé je t’aime
Contre tout ce qui n’est qu’illusion
Pour ce cœur immortel
Que je ne détiens pas
Que tu crois être le doute
Et tu n’es que raison
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi
Tu es le grand soleil
Qui me monte à la tête
Quand je suis sûr de moi
Quand je suis sûr de moi



Retrouvez ici   les poèmes  de  Paul Eluard :
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