lundi 31 octobre 2011

Tolstoï , Resurrection : petite rancune ....


Je n’ai jamais été inconditionnelle de quoi que ce soit , de qui que ce fut , mes amours n’exigent pas la perfection . Il m’arrive même d’aimer des gens franchement détestables . Le cœur a ses raisons….. (vieil adage qui va se trouver ironiquement illustré ici… ) Mes auteurs préférés ne font pas exception à la règle. Des désaccords au cours de mes lectures en deviennent parfois obsédants et parce qu’écrire est bien le seul moyen d’échapper à l’idée fixe , comme si une fois déposées sur le papier ou sur l’écran , nos obsessions se faisaient beaucoup plus légères , tolérables, comme si de les avoir figées dans l’écriture nous permettaient de les ranger en lieu sûr afin de pouvoir prendre le risque de les oublier afin de passer à autre chose , je vous fais part de quelque rancune que je garde à l’un de mes auteurs préférés après avoir refermé Résurrection son ouvrage majeur que je tiens toujours par ailleurs, pour admirable .

Je ne lui en veux pas trop de ne pas s’être prononcé plus radicalement en faveur des mouvements révolutionnaires de son époque : Il a suffisamment œuvré, payé de sa personne et servi pour éclairer les esprits .
Je ne lui tiens pas rigueur d’avoir révélé l’unique chance de salut de Nekhlioudov-Tolstoï dans les Evangiles , le problème de l’insondable mystère de la foi ne se discutant pas .
Mais je lui reproche certains propos qui lui ont valu cette réputation de misogynie . Le mot est certes un peu fort à mon avis lorsqu’on sait sa compassion pour Anna Karénine , dont il dit être tombé amoureux en écrivant son roman et sa piètre considération du genre masculin qui a conduit Katioucha au bagne . ..


 Mais comment rester insensible, lorsqu’il déclare , parlant d’un révolutionnaire calculateur, intransigeant et ambitieux : […]d’une tendance morale opposée à celle de Simonson . Chez ce dernier, de complexion éminemment masculine, les actes découlaient de l’activité mentale et étaient déterminés par elle. Novodvorov, au contraire appartenait à cette catégorie de gens , de tempérament spécifiquement féminin, chez qui l’activité mentale en partie est employée à des desseins auxquels les porte leur vie sentimentale, en partie justifie les actes que cette vie leur inspire .[…]
N’est-ce pas ce caractère " éminemment féminin" , partagé heureusement par beaucoup de représentants du genre masculin, qui rend la vie beaucoup plus supportable , privilégiant le sentiment à la raison , la compassion et l’amour y compris parfois devant l’équité ou la justice au nom de laquelle on commet tant de cruautés .

Germaine Tailleferre : Sonate pour Harpe

  sonate pour Harpe : I Allegretto

 sonate pour harpe II

  sonate pour harpe III: Perpetuum mobile

Biographie et oeuvre de Germaine Tailleferre    
Extrait :
" ....En 1917, Erik Satie est impressionné par la pièce pour deux pianos de Germaine Tailleferre, Jeux de plein air, et la déclare être sa « sœur en musique ». Il l'invite à rencontrer le groupe les « Nouveaux jeunes », mouvement des musiciens « des fausses notes », qui se réclame aussi de Claude Debussy, mais dont l'animateur se révélera être Jean Cocteau.
Ce groupe est en étroite relation avec des poètes comme Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Blaise Cendrars, Léon-Paul Fargue, Paul Éluard, Louis Aragon, ou des peintres comme Pablo Picasso, Georges Braque, Fernand Léger, André Lhote, Moïse Kisling. C'est dans l'atelier d'un de ces peintres que les « Nouveaux Jeunes » donnent leur premier concert le 15 janvier 1918. Germaine Tailleferre y donne « Jeux de plein air », pour deux pianos (qui sera arrangé pour orchestre en 1924) et la Sonatine pour quatuor à cordes. La même année, elle joue « Jeux de plein air », avec Ricardo Viñes, à la Societé Nationale de Musique.
Vers 1919-1920, commence une longue collaboration d'étude, qui durera près de dix années, avec Maurice Ravel. Un article du critique musical Henri Collet, dans « Comœdia », en 1920, rebaptise les « Nouveaux Jeunes » : « Groupe  des  six ». Groupe composé de Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc et Germaine Tailleferre, auxquels il faut ajouter le septième, Jean Cocteau.....
En 1920, elle prend part à l'œuvre collective du « Groupe des Six », le ballet « Les mariés de la Tour Eiffel », qui marque symboliquement la fin de l'expérience esthétique collective des « Six » ....."

mercredi 26 octobre 2011

Respighi , Caravaggio, Tree of Life,Terrence Malick,

RESPIGHI: Siciliana and Italiana - Paintings By "CARAVAGGIO" 


Tree of life

Un film bouleversant et qui me laisse dans une profonde mélancolie à cause  ou  malgré  sa beauté .
Prodigieusement  servi par   une   BO rassemblant   quelques uns des plus  beaux  morceaux  de  musique de nos grands   compositeurs choisis  par   et  avec des  compositions d'  Alexandre  Desplat .
 Les  "danses   siciliennes  " de  Respighi , accompagnent  la  séquence   qui  m'a peut être le plus  émue . mais  l'ensemble est  d'une "écrasante"  beauté .

mardi 25 octobre 2011

Edvard Munch

Edvard  Munch
1863-1944

Autoportrait à  la cigarette 1895

Munch  par Jean  Selz

Travaillé  par une psychologie  morbide,  le norvégien Edvard  Munch n'a  cessé  d'exprimer  une vision pessimiste  et  angoissée  de l'existence  .  Ayant  assimilé l'impressionnisme, il  infléchit  ensuite le  synthétisme  de  Gauguin en  unifiant la tonalité et en donnant  à la forme une concentration   toujours plus expressive  .
L'effet  dramatique de ses oeuvres  les plus poignantes, comme le  cri  ou l'nagoisse, culmine dans la simplification des moyens que  renforce  son  expérience de la gravure  sur  bois, de  l'aquatinte et  de  la  lithographie.
Il est  considéré  comme  le précurseur  de l'expressionnisme, en  particulier par l'influence qu'il  exerça  sur le  groupe allemand Die  Brücke


Mélancolie1891
Angoisse 1894

Le  cri  1893




Matin 1892




Vampire  1893

Madone 1894

Puberté 1894
Stéphane  Mallarmé 1896



La danse  de la vie 1899-1900


Femmes sur la plage 1898


Jeunes  filles sur le pont  1901





Rencontre  dans l'univers 1899
Jeune fille malade 1906-1907



soleil 1909-1911 Fresque principal du Palais  des  Fêtes d'Oslo.

samedi 22 octobre 2011



Septième Elégie

Ta voix , qu'elle  ne soit plus  pour nous séduire,
Qu'elle  ne soit plus un appel ,
mais simplement  cette voix trop  adulte.
Certes  ton  cri  était pur
Comme celui de l'oiseauque soulève la saison,
oubliant presque  dans l'envol qu'il  n'était plus qu'une bête  asservie,
et non pas  ce coeur  unique qu'elle lance à  l'allégresse des  ciels plus amples.
Comme  lui  tu  appellerais pour que l'amie
encore invisible,- la silencieuse- te  découvrît.
Doucement  s'éveillerait  en  elle la réponse
à laquelle  ton  attente donnerait  sa chaleur.
Un coeur  ardent pour tout ce que tu  ressens  avec  audace.
Et le printemps te comprendrait,
puisqu'il n'y a  point de lieu qui  ne porte le chant annonciateur.
D'abord cette  voix  frêle  qui  interroge
et qu'entoure largement  de son silence grandissant
la clarté d'un jour   approbateur. Ensuite,
gravissant les marches, vers le temple rêvé de l'avenir,
le trille :  fontaine qui  de ses éclairs devance  la chute, 
ah le jeu  des promesses .. 
Et devant  soi l'été. 
Non  seulement  tous les matins de l'été,
non seulement   lorsqu'ils  se changent en  jour,
encore rayonnant  de naître.
Non seulement  les jours si  tendres pour les fleurs,
-ces jours qui  à  hauteur d'arbres deviennent  violents -
mais le  recueillement  des de ces forces déployées.
Non seulement  des chemins, des prairies au  soir,
cette  clarté  qu'on  sent respirer après l'orage tardif;
non seulement   l'approche  du  sommeil et  ce pressentiment,
les soir...
Mais les nuits !  Les hautes nuits d'été, les étoiles,
étoiles de la terre.
Etre  mort un  jour et les connaître sans  fin ,
toutes les étoiles,  car ,  - oh  comment,
comment les oublier !
Vois , c'est  alors que j'appellerais  l'amante.
Mais elle ne viendrait pas seule.
Sorties de leurs tombeaux fragiles, des jeunes  fillles
viendraient;
Elles seraient là  devant moi...Car l'appele lancé,
comment en  limiterais-je le cours ?
Les engloutis cherchent encore la terre.
Pourtant une fois  saisie, une chose terrestre
pourrait bien  être plantée en  d'autres mondes.
Ne croyez pas que le  destin est  plus que cette  densité 
de l'enfance
combien  de  fois ne  dépassiez-vous  pas le bien  aimé,
Rien  qu'en  respirant !
Comme  on respire au  bout d'une course joyeuse qui  n'avait pour  but que le  large.
Etre   ici  est magnifique
Jeunes filles ,  vous le  saviez ! Vous aussi.
Vous qui  aviez  été   privées  en  apparence,
noyées,dans les pires ruelles des villes,
ouvertes à  la déchéance, suppurantes..
Car  chacune avait une heure,peutêtre pas tout à  fait ,
-intervalle  à  peine  accessible à  nos mesures..
où elle  avait  sa pleine  existence.
Tout . Les artères remplies d'existence.
Seulement  ,  nous oublions très vite  tout  ce que  le  voisin en  riant
  ne nous confirme ou  envie.
Nous voulons qu'aux yux de tous  éclate notre bonheur,
mais le bonheur le plus évident ne se laisse reconnaître
Que transfiguré au  fond  de nous mêmes.

Nulle part ,  ô bien  aimée, le monde
ne  sera comme à l'intérieur  de nous-mêmes
Notre vie  s'use en  transfigurations.
Et  de plus en   plus mince , le  dehors disparait .
Là  où jadis il  y eut une maison durable,
Voici une image  tout à  fait du  domaine  des idées,
comme si  elle  n'avait pas encore quitté le cerveau.
L'époque  se  crée de  vastes entrepôts de  forces,
informes, comme l'impulsion mal  contenue qu'il  puise dans les choses.
Il  ne connait plus les temples. Cette prodigalité du  coeur
nous devons la  garder en  secret.
Oui  là  où survit une chose  que jadis on  a  servie, adorée
à genoux, la voici qui  se tient  là du côté de l'invisible .
Nombreux sont  ceux qui ne la regarde même  plus
sans pouvoir cependant la reconstruire plus vaste à  l'intérieur.
avec statues et colonnes.
Chaque  conversion  du  monde connait
ces déshérités qui ont perdu leur passé  et n'ont point
de part   en  ce qui est  à venir.
Car même le plus proche  est  distant pour les hommes.
Mais nous,  au  lieu  d'en être  troublés,
ayons le courage  d'affermir  la forme  de   ce qui  est encore reconnu.
Celà se tenait u  jour parmi les hommes,
debout au   milieu  du  destin exterminateur,
au coeur de  "ne- plus- savoir- le- chemin".
Celà semblait existé   et les étoiles
 d'un  ciel  très assuré se penchaient par-dessus.
Ange, je te le montre encore,  le voici,
qu'il  soit enfin  sauvé dans ton  regard,
enfin  redressé. Colonnes,  piliers,
le sphynx, la cathédrale,- l'élan  d'arc-bouté d'une cathédrale,
grise au  milieu  d'une ville périssante ou étrangère.
N'étai-ce point miracle ?
Admire ,  ô  Ange,
car  c'est de nous qu'il  s'agit, raconte
ce que nous vons osé ; mon  propre  souffle  est trop  faible pour louer.
Ainsi,  malgré tout, nous n'avons pas manqué aux  espaces,
à ces espaces prometteurs,  les  nôtres.
(Comme ils doivent  être vastes,  terriblement,
pour que des millénaires de nos sentiments n'arrivent  pas à  les déborder !)

Cependant une tour  était grande, n'est-ce pas ?
Elle  l'était ô  Ange, grande même  à  côté de toi.
Chartres était  grand -et la musique
allait  au- delà  encore  , elle nous dépassait.
Et même une amante , oh,à  elle-seule
dans la fenêtre nocturne...
Ne t'arrivait-elle pas aux genoux ?
Ne crois pas que je plaide ma cause. Et même
si  je réussissais Ange,  tu  ne viendrais pas.
Mon  appel  sonne toujours le  départ,
et  tu  ne saurais franchir un tel  courant.
Comme un  bras tendu  est mon appel,
et la main ,  en   haut,  ouverte pour  saisir,
reste ouverte  devant toi , comme une défense ou un avertissement.
Insaisissable  ,  au  loin .

Rainer   Maria Rilke  ,Elégies  de Duino

L'éloquence des silences de Schubert


26 Avril 1827



Sviatoslav Richter plays Schubert Allegretto in C minor, D.915

" Un thème à l'extrême simplicité s'élève à l'unisson des deux voix , mais il ne parvient pas à prendre son élan et retombe doucement sur lui -même, il est repris, puis la troisième fois les deux voix s'écartent, se poursuivent , symbolisant l'éloignement, mais se retrouvent à l'unisson . Le thème revient alors, mais en majeur , presque douloureux pour conclure à nouveau en mineur. Les silences déjà importants dans cette exposition deviennent le coeur psychologique du discours dans la partie médiane. Les voix se cherchent, s'appellent, le discours réapparait comme une vision fugitive et s'estompe et c'est bien sur un double adieu que s'achève la partie médiane. La première partie est alors reprise intégralement... Le dialogue est indifférent à l'absence." Brigitte Massin

Cette  pièce  a  été  écrite  par  Schubert   et donnée  à  son  ami  Walcher  lors de son  départ  de  Vienne ....

dimanche 16 octobre 2011

Tolstoi: Resurrection : Littérature et cinema


Comparer  un film et  un  livre  d'une  telle importance peut paraitre  un exercice  superflu  et  on s'attend  aux  remarques habituelles ,  difficile,  impossible,  ambitieux , réducteur  ... etc   Mais  si  je  gardais  une mémoire relativement   précise de l'oeuvre écrite  , j'ai  tout de suite été saisie et troublée par  la beauté  du film  des Frères Taviani .
Avant  donc d'oser une comparaison , j'ai  éprouvé  le besoin  de  relire   le  livre  .  
On  peut avancer  sans  trop  de risques de se tromper  que  la grande problématique  dans l'oeuvre  de Tolstoï c'est l'existence  de l'individu  et ses  capacités  de  résistance  à  l'environnement déterminé  par sa  naissance, que  les  contraintes soient le fait  de  l'histoire (Guerre et  Paix),  de sa classe   sociale(Anna  Karénine )  ou de son sexe (Résurrection ) les trois thèmes  étant  bien  sûr  tous  plus ou  moins présents et  entremêlés  . Dans Résurrection ,  l'oeuvre ouvre  sur  une  critique  sociale acerbe visant particulièrement  les institutions du régime  tsariste  en particulier le système pénitentiaire   mais  aussi  la corruption  de la plupart  des institutions: justice  ,armée, aristocratie civile et  religieuse, exploitation de la classe paysanne  maintenue dans l'illéttrisme, séquelles du servage bien  qu'il  ait  été  théoriquement aboli en 1861...,  bref  vaste  critique  de  la société.
C'est  donc avant tout un roman social , à l'époque  jugé    subversif   avec  de   nombreuses   coupures imposées  par la   censure   en dépit   du  prestige mondial dont  bénéficiait  déjà   l'écrivain  en  1899 lors de la publication  de son ouvrage.
La  lucidité de  Tolstoi  , n'épargne   pas dans son récit  les  autres  couches sociales de la population russe  de l'époque  , les paysans  dont il stigmatise l'apathie face   aux mesures  d'émancipation et à l'éducation , leur crédulité tournant à la superstition entretenue par le  clergé , la cupidité des petits  bourgeois, commerçants ,domestiques tous se  livrant  aux mesquineries et bas calculs  d'intérêts sordides
 mais  ce réquisitoire   général et pessimiste  lui permet de mieux  mettre  en valeur   les  êtres  d'exception , qui créent  les instants privilégiés dans des  élans  de  générosité  , de  dévouement, de  solidarité   qui illuminent  ça et  là  notre médiocre condition  humaine   en nous faisant  parfois  rêver  d'un  paradis à portée de main  (premières amours de   Katioucha et Nekhlioudov)  
La perversion nait  de la  société  qui  tord  les caractères, brise les rêves  et les meilleures intention; la responsabilité  est  collective  qui crée  les  conditions  du  vice  et  de la délinquance mais elle préfère   punir  celui  qui  chute plutôt  que  de  s'attaquer  aux causes  du  mal  ...
 Quelques   personnages  d'une    grande  beauté  morale  échappent  à ce système   dans une  sorte  de  grâce  exceptionnelle ,( le doux  et pur réaliste Simonson)  on  pense au  Prince  Michkine  de Dostoievski   ou à son  Aliocha  mais  plus souvent   chez  Tolstoi   ce sont  chez le même  individu des  qualités   qui  coexistent avec d'autres   vices ou  des  défauts   car  comme il   déclare au début  de son livre  ,"  Les hommes sont  semblables aux rivières: toutes sont  faites du  même  élément, mais elles sont  tantôt  étroites, tantôt  rapides, tantôt larges  ou  paisibles, claires ou froides, troubles ou tièdes. Et les  hommes  sont  ainsi. Chacun porte en  soi  le germe de  toutes les qualités humaines et  manifeste  tantôt un côté de sa nature, tantôt  l'autre, souvent même  tout  en conservant sa  nature intime,  il apparait tout différent de ce qu'il est."

Un  autre  thème
En  choisissant pour  fil  de l'intrigue ce   grand  l'épisode  amoureux   Tolstoi  comme il l'avait  déjà  fait  avec Anna Karénine  aborde le   thème   du féminisme en tant  que catégorie opprimée et sacrifiée sur l'autel  des  conventions  sociales. Anna   vaincue  par  son  statut  social  et  ses  conflits moraux  qu'il  engendre ne trouve  d'issue  que dans la  mort ;  dans un réalisme  aussi  douloureux sinon  pire  la vie de  Katioucha/Maslova est  brisée  par  l'oppression  du  mythe  machiste   où les femmes   sont légitimement  convoitées, harcelées et  forcément responsables et  coupables.

Comme pour Niekhlioudov  de son  roman  en grande partie  autobiographe , pour   Tolstoi    les injustices   sociale , sexistes   politiques   , sociétales  ne sont pas une fatalité
 L'essentiel  est  dans  une prise de  conscience  de  "l'honnête homme"  qui comme  N  au  tribunal  se  voit  confronté à  son  passé , reconnait  sa faute , accepte  le  remord   jusqu'à la torture qui  le déterminera  à  l'action    en  vue  de la réparation .
 Se pose alors  les  moyens   d'y parvenir  mais toute  faute  est-elle  réparable?
 C'est la  grande question , non  pas  "que faire"  , mais  que  faut-il  faire ?
 "Je l'épouserai"   décide Nekhlioudov
La faute sociale  devrait  trouver réparation  dans l'engagement politique ou  civil:  la reconstruction  dela  société par  la réforme ,  le contrôle  des institutions  ?
Dans son livre  Tolstoi  interroge  les multiples courants  d'opposition  qui  ont  secoué  la Russie  à  la veille  du   XXème  siècle C''est le  principal sujet  de la seconde partie  de l'ouvrage  où  il  descend avec son héros dans l'enfer d es prisons ,  scrutant  les condamnés   de  droit commun  mais  surtout  polémiquant  avec   les idéologues , les révolutionnaires.

Finalement   ,  incapable  de  soutenir   les  utopies  aux  menaces  trop brutales,  Niekhlioudov.  tout  comme Tolstoi l'irréductible pacifiste ,  préfére la  fuite ,   et  cherchera le  salut  ailleurs   dans  une  la spiritualité  anarchisante écartant  l'idéalisme   aux   fatales dérives sanglantes .

Quant  à la faute morale  qu'illustre le comportement   de  Nekhlioudov envers  Katioucha ,   celle-ci ne  trouve réparation  au  mieux que  dans le pardon  La faute   ne peut être  effacée   ce qui  est passé est passé comme dit  Maslova quand elle  refuse le sacrifice de  Nekhlioudov . Peut  on parler  alors  de   renaissance  ou  de résurrection ?
"Tout  coule" mais    rien  ne ressemble  à rien, répond Tolstoï  au  Grec  Héraclite ..




  Maintenant,   comparer  livre et  film...?
Evidemment impossible de  retracer  toutes les  demonstrations des thèses philosophiqes et  economiques, de Spencer   à  Georges   en  passant par  Thoreau  mais  j'admire  la  manière   scrupuleuse  dont   les  fréres  Taviani  ont   suivi  le  roman de Tolstoi.   On  pourrait  leur  reprocher  d'avoir donné  trop  de  beauté  à  la misère  de  l'homme, les  images sont  splendides ,  les  plans  toujours    évidemment  esthétiques  donnent   des  personnages  une vision  un  peu trop  idealisante  , un peu trop  policée, l'ironie   de  l'écrivain  est  absente  . le film ne renonce  jamais  à  la beauté. Les multiples  personnages   secondaires  du  livres sont   rapidement  ébauchés  au  profit  de  l'histoire   de  Katioucha  et  Niekhlioudov  sur qui se concentre le  film   .mais   la narration  cinématographique  des Frères  Taviani est  suffisamment  expressive  pour  nous entrainer si  le spectateur  y consent , dans la réflexion  philosophique, politique  et  sociale  de  Tolstoi., à  condition   me  semble-t-il , d'avoir   lu  le livre   avant   de  voir le film.

Quelques   images  du  début  du livre et  du   film  ....
 L'essentiel  est  dans  la  prise  de  conscience



 A la fois  farouche  et   arrogante

 La pureté d'un  amour  de  jeunesse faisant  fi  des conventions sociales

 L'idealisme de  l'un  , la confiance  de  l'autre

La terre   ne   saurait  appartenir  à  celui  qui  ne la travaille pas 

Trois ans  après
 Christ est ressuscité





Serge Reggiani: ''Le dormeur du val'' (A. Rimbaud)/ ''Le deserteur'' (B....

 

Un grand  classique 

Khalil Gibran, Le chant de la vague

Khalil  Gibran


LE CHANT DE LA VAGUE

Le rivage et moi sommes deux amants que la passion rapproche et que l 'air sépare. Je viens d'au-delà de l'horizon azuré mêler l'argent de mon écume avec l'or de son sable et rafraîchir de ma salive l'ardeur de son coeur.

A l 'aube , je récite les canons de l'amour passionnel aux oreilles de mon bien-aimé et il me serre contre sa poitrine . Le soir , je fredonne la prière du désir ardent et il me couvre de baisers.

Je suis insistante et impatiente alors que mon bien-aimé est un allié de la patience et un associé de l 'endurance.

Quand vient la marée haute j'étreins mon bien-aimé , et quand la marée basse la suit , je m'agrippe à ses pieds.

Que de fois ai-je dansé autour des sirènes , quand elles sortaient des abysses pour s'asseoir sur les rochers et contempler les étoiles! Que de fois j'ai entendu un amant se plaindre de son amour passionnel pour une belle créature et l'ai-je aidé à se soulager par des soupirs! Que de fois ai-je câliné les rochers alors qu'ils restaient inertes et que de fois les ai-je chatouillés en éclatant de rire et pourtant ils n'esquissaient aucun sourire !Que de fois ai-je arraché aux abysses des corps qui se noyaient et les ai-je ramenés au monde des vivants! que de fois ai-je volé des perles aux profondeurs pour les offrir à des déesses de beauté!

Dans la quiétude de la nuit , quand les créatures enlacent le fantôme du sommeil , je reste éveillée tantôt en chantant et tantôt en soupirant . Pitié, la veille m'a éreintée ! Toutefois je suis amoureuse et l'amour véritable se reconnaît par la veille .

Telle est ma vie , et tant que je vivrai , ainsi je resterai .

LARME ET SOURIRE , CHANTS
Khalil  Gibran

vendredi 14 octobre 2011

Modigliani et Anna Akhmatova

Modigliani et Akhmatova se sont rencontrés à Paris en 1910, lorsque la poétesse était en voyage de noce avec le poète Nikolaï Goumilev dont elle se séparera en 1918 et qui sera fusillé  en 1921.

 Le peintre fit  plusieurs  dessins  de la poétesse dont quelques uns nous sont parvenus   mais   elle  est rarement  clairement  identifiée dans  ses peintures .

Célèbre  citation  de la poétesse :

 « Tout le côté divin de Modigliani étincelait à travers la pénombre. Il ne ressemblait à personne d’autre au monde ».



Et puis j'ai  cessé  de  sourire;
Un  vent  glacé gerce  les lèvres.
Un espoir  vient  de mourir - 
Une nouvelle  chanson  va  naître.
 Et  ce  chant  je le  livrerai
A vos  rires ,  à  vos  sarcasmes,
Car l'amour  sans  voix  à  jamais
M'est  devenu  insupportable 
Printemps   1915


Le  lundi  , Vingt  et un .  C'est  la  nuit.
La  ville  dort  sous la  brume  triste.
Quel  Jean-foutre  saisi par  l'ennui
Proclama  que l'amour ça existe ?

Et ,  par  ennui  ou  par habitude,
Tout le monde l' a cru  - et  toujours
On  espère ,  on craint les  ruptures,
Et  on chante des  chansons  d'amour.

Mais   certains  découvrent le  secret,
Et  ceux-là,  le  silence les habite.
Par  hasard  j'ai  su  la vérité,
Et  depuis  je suis  comme  maudite .

(1917)

--
Et  la  mort vers  toi  se penche
Sur la neige pâle :
Vingt huit  coups à  l'arme  blanche.
Cinq blessures par  balle.
Un  bien  triste   vêtement
Il  faut  que je  te couse :
Elle aime, elle aime le  sang
Notre  terre  russe.

(1921  Pour Goumilev)

Modigliani

 Femme  à la cravate noire
Parmi les portraits  féminins, la femme  à la cravate  noire occupe une  place à  part pour son  caractère inédit d'une tendresse et  d'un  intimisme presque  crépusculaire.  la palette extrèmement  sobre utilise  la gamme  des  gris, à peine  réhaussés par  la fleur  rouge  des lêvres.


 
 Jeanne


 Femme  à la guimpe


 Ce  nu  date  de l'époque où l'intérêt de  Modigliani   s'adressait  principalement à la sculpture et  l'on  retrouve une  référence ponctuelle dans la plasticté et  la pose initiale, transfigurée  cependant  par l'expression  d'abandon  résigné qui  se  dégage  de cette  figure.

Les  nus  de  Modigliani  sont  des arabesques musicales 


 Autoportrait   1919


..Les moyens  linéaires sont à  la base  du  style de l'oeuvre de Modigliani qui  leur  doit  sa clarté :  le sujet  du  tableau  est immédiatement lisible dans le dessin , dont les inflexions  très sensibles traduisent   jusqu' aux plus subtiles nuances  du  sentiment de l'artiste.


 Garçon avec  un chapeau


 Jeanne

Jeanne
Sa silhouette  menue de  lys   art nouveau, bien  qu'engoncée  dans un chandail dans l'attente de  sa seconde maternité tragiquement  interrompue par le  suicide  , est  réhaussée par  Modigliani dans  ses  valeurs  d'arabesques musicales .

 Fillette  en  bleu (1918)