lundi 29 septembre 2014

Richter par Bruno Monsaingeon

[...]
Richter est l'un de ceux qui donnent le plus fort ce sentiment de "dématérialiser" la musique. Tel un canon qui tirerait un obus sans recul, un avion qui s'envolerait verticalement sans élan, il est capable de varier les couleurs à l'infini et sans dégradé, de passer du pianissimo le plus impalpable au fortissimo le plus volcanique sans césure ni force d'inertie. S'il donne parfois l'impression d'une lutte avec la matière, c'est pour la pulvériser, et laisser naitre le chant pur, dans l'ivresse des pièces les plus hystériquement virtuoses où ses doigts font reculer les limites du physiquement possible, comme dans l'extrême lenteur d'adagios qu'il sait, comme personne, habiter d'un sentiment de totale immobilité. [...]
Voir l'article   complet  sur  le  site  de   Bruno  Monsaingeon : INTERPRETES/RICHTER

jeudi 25 septembre 2014

Penser à quelqu'un...





Comment  penser son proche  aimé  ou  haï , par le philosophe  Frédéric  Worms.
"Avant même  de penser  à  quelqu'un , nous sommes liés  à  ceux qui  ont pensé  à  nous et à qui  nous  penserons le plus  ,parce que notre  pensée  même  a surgi  peu  à  peu  de  là  " .
Penser  revient d'une part  à  concevoir, juger, raisonner , autrement  dit  à l'acte de   rapporter un  fait à  un sens  ou bien    : à vouloir, entendre,   imaginer,  rêver,  sentir...
Mais  "Penser  à  "  c'est  être  habité  par  l'autre. 

Ce pourquoi dans l'obsession qui nait de la passion amoureuse ou de la tyrannie ou de la dégradation d'une relation qui engendre la haine , l'homme se limite au "penser à "
qui écrase toutes nos pensées et fait de chacun de nous une "chose" à laquelle nul ne pense et qui ne peut penser à rien .

Conclusion  de   Robert  Maggiori dans  l'article  de  Libération  du 25.9.2014.

samedi 20 septembre 2014

Fernando Pessoa : l'ultime sortilège


 L’ultime sortilège

Voilà  que j’ai  redit l’incantation  mystique,
Mais  la   grande  Déesse  à  mes  yeux s’est niée…
Que j’ai  redit, dans les pauses du vaste vent,
Les litanies dont l’âme   est un  être fertile.
Rien  ne  sort  de l’abîme   ou  n’apparait le  ciel.
Seul  me  revient le  vent où  je suis  tout  entière
Et  Seule, et  tout  reste  endormi dans le  trouble  du  monde.

Mon talisman jadis envoûtait les  halliers
Et  mes invocations faisaient  surgir  du  sol,
Dense  rassemblement, les  présences éparses
Qui  dorment  dans les formes  naturelles des choses.
Jadis  ma voix en  acte allait s’accomplissant.
Elfes et fées , si  j’appelais,  je les voyais,
Et les  feuilles brillaient dans la forêt , lustrales.

Ma baguette enchantée, grâce  à  qui  je parlais
Du fond de  mon  vouloir aux exigences essentielles,
Ne  sait  plus,  c’en  est  fait, ma  nature profonde.
C’en est fait,  quand je trace le  cercle , il n’y a rien.
Le vent, murmure neutre, étouffe  les soupirs,
Et sous  le  clair  de lune au  loin  haut sur les  landes,
Je ne suis rien  de  plus que les bois  ou  la route.

Voilà que meurt le don qui me   faisait aimer,
Que je ne deviens  plus forme et  fin  de la vie
Pour ceux qui me  cherchaient dès que je les  cherchais.
L’océan de leur s  bras,  plage, plus ne me  baigne.
Plus  ne me  voit  dressée en salut  au soleil
Ou à la  lune, dans les égarements d’une  extase
Magique, sur le  seuil de ma caverne immense.

Voilà que les  sacrées puissances de l’enfer,
Qui  sont, dans leur  sommeil sans dieux et  sans  destin,
L’exacte image de la substance des choses,
N’entendent plus ma voix, n’entendent plus  leurs  noms.
La musique  soudain  s’est brisée de mon  hymne.
Mon astrale  fureur,  hélas ! n’est  plus divine,
Dans le recueillement mon corps n’est  plus  un  dieu.

Les déités lointaines  du  puits  enténébré,
Que  tant  de  fois, en ma  pâleur, j’ai  invoquées
Dans la rage d’aimer en  prie  aux convulsions,
Sans  une invocation  se  tiennent  devant moi.
Et  comme, sans  devoir les aimer  , vers elles  j’appelais,
Maintenant,  sans  aimer, je les possède, et je  sais
Qu’elles consumeront  mon être  déprécié.

Mais toi,  pourtant  Soleil, dont l’or fut mon butin,
Et  toi  , ô Lune dont j’ai  converti l’argent,
Si vous ne pouvez plus  m’offrir  cette  beauté
Que tant de  fois j’ai eue  pour fin  de mon  vouloir,
Divisez donc  au  moins mon  être  évanoui –
Que  mon  être  essentiel  en  lui-même  se perde,
Et que  seul mon corps soit, sans moi,  une âme ,  un  être !

Ah !  que me change enfin mon  ultime  magie
En statue de moi-même  en  corps vivant  sculptée !
Que celle  que je suis meure, mais  l’autre que je  fis de moi
Et  qui  fut, qu’elle  soit, anonyme présence  à  soi-même enlacée,
Chair de mon  éthéré, de mon captif amour,
Cette mort  de  moi-même en quoi  je viens revivre ;
Et  telle   que je  fus,  n’étant rien , que  je  sois !

Poèmes  ésotériques  
Traduit du  portugais par  Michel  Chandeigne et Patrick  Quillier

dimanche 14 septembre 2014

Baudelaire , Delacroix la servante au grand coeur

Une asssociation  quelque   peu   fantaisiste   mais  ...  C'est  aussi   ça  la poésie  , des  émotions  qui  se  croisent  des fils qui s'entrelacent  ..
Comme je lisais  la  biographie  de   Delacroix  ,  un vide sentimental  apparent  mais sûrement  trompeur  , et son  attachement  durant  de  très  longues années  avec  sa servante  qui  partagea sa vie   jusqu'à  la mort   , l'incipit   bien  connu  d'un  poème  de  Baudelaire  s'imposa  ...
La servante  au  grand  coeur  dont  vous  étiez   jalouse  ...
Bien  sûr  aucun  rapport  entre  la servante Mariette qui  remplaça si  souvent   la mère  de  Baudelaire  auprès  de lui  et  Jenny,  Mais Baudelaire  et  Delacroix  étaient  contemporains ,  Baudelaire   vénérait  Delacroix  , tous deux furent   aimés et   protégés par  une  servante  au grand coeur   , qui  leur fut   dévouée  corps et  âmes  . ..
La comparaison  doit  s'arrêter là.  Rien  d'autre naturellement   mais   relisons  à  nouveau  ce  poème , sous le  regard  attentif  de   Jeanne-Marie   Le  Guillou , anglicisée  en   Jenny  par  Delacroix  lui-même   .
Elle   garde à  vous  comme  un soldat   mon temps  et  ma vie  (Eugène Delacroix )

Delacroix  :  Jeanne Marie  Le  Guillou dite   Jenny
 La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse

La servante au grand coeur dont vous étiez jalouse,
Et qui dort son sommeil sous une humble pelouse,
Nous devrions pourtant lui porter quelques fleurs.
Les morts, les pauvres morts, ont de grandes douleurs,
Et quand Octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certe, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
À dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,
Tandis que, dévorés de noires songeries,
Sans compagnon de lit, sans bonnes causeries,
Vieux squelettes gelés travaillés par le ver,
Ils sentent s'égoutter les neiges de l'hiver
Et le siècle couler, sans qu'amis ni famille
Remplacent les lambeaux qui pendent à leur grille.
Lorsque la bûche siffle et chante, si le soir,
Calme, dans le fauteuil je la voyais s'asseoir,
Si, par une nuit bleue et froide de décembre,
Je la trouvais tapie en un coin de ma chambre,
Grave, et venant du fond de son lit éternel
Couver l'enfant grandi de son oeil maternel,
Que pourrais-je répondre à cette âme pieuse,
Voyant tomber des pleurs de sa paupière creuse? 

http://batxibac.sitego.fr/analyse-la-servante-au-grand-coeur-dont-vous-tiez-jalouse.html 

mercredi 10 septembre 2014

Leopardi et la mélancolie.


Franz Hals  ,  la bohémienne
Les  jeunes gens  croient très souvent se rendre aimables  en feignant la  mélancolie. Certes, quand elle  est  feinte, la mélancolie peut-elle  plaire un  moment, surtout aux femmes, mais lorsqu'elle ne l'est pas, tout le monde la fuit. Seule  la gaieté plait et  réussit  dans le commerce des hommes, car,  quoi  qu'en pensent  les jeunes gens, le monde  ,  avec  raison , n'aime pas les  larmes, mais  le  rire .

Giacomo  Leopardi , Pensées XXXIV

lundi 8 septembre 2014

Prokofiev - Lieutenant Kijé//Romance





Le lieutenant  Kije ou  l'homme  qui  n'existait pas
 Nouvelle  de   Iouri Tynianov (1894-1943) dont un  film fut   tiré en  1933 pour lequel  Prokofiev  composa  la musique  et dont il  fit la suite symphonique  opus  60
La  mélodie   reprise  dans cette  romance  est   une   melodie   populaire russe   que le  chanteur  Sting   utilisa également  , parue dans son album de  1985 sous  le  nom  de  Russians  prechant la  paix entre les deux  blocs  de  l'époque de la guerre  froide.
sur Wikipédia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Lieutenant_Kij%C3%A9


Baudelaire : Le squelette laboureur


                      I
Dans les planches d'anatomie
Qui  trainent sur ces quais  poudreux
Où maint  livre cadavéreux
Dort comme une momie,

Dessins auxquels la gravité
Et le savoir du  vieil  artiste,
Bien  que le   sujet  en  soit  triste,
Ont  communiqué  la  Beauté,

On voit  ce qui  rend plus complètes
Ces  mystérieuses horreurs,
Bêchant comme  des laboureurs,
Des Ecorchés et des Squelettes.

                    II
De ce terrain que  vous fouillez,
Manants résignés et  funèbres,
De tout l'effort  de  vos vertèbres,
Ou de vos  muscles dépouillés,

Dites  , quelle  moisson  étrange,
Forçats arrachés au  charnier,
Tirez-vous , et  de  quel  fermier
Avez-vous  rempli la grange?

Voulez-vous (d'un dessin trop  dur
Epouvantable et  clair  emblèm !)
Montrer que dans la fosse  même
Le sommeil promis n'est pas  sûr;

Qu'envers nous le  néant est  traître;
Quet out  même  la  mort nous ment,
Et que sempiternellement,
Hélas!  il  nous faudra  peut êtrre

Dans quelque pays  inconnu
Ecorcher la terre revêche
Et pousser une  lourde bêche
Sous notre pied  sanglant  et nu ?
(Tableaux  parisiens  )

dimanche 7 septembre 2014

mardi 2 septembre 2014

Les principaux acteurs du Kalevala





Sampo : objet magique inconnu, source  de  prospérité  .(J.L.Perret  ,  compte tenu  de l’importance  du  terme  dans  le  Kalevala  nous renvoie  à sa   préface  ).G. Rebourcet  nous  propose : objet extraordinaire  , assez connu  pour que  Louhi  demande  à  Ilmarinen de le forger pour la  prospérité de Pohjola. Le Sampo  est une   sorte  de  moulin, source intarissable  de  bonheur  et  de richesse et  à  ce  titre  il  est  le  noyau  de la geste  du  kalevala. Même  brisé  ses  morceaux suffiront à engendrer pour le  peuple finnois une prospérité  durable. C’est  un « couvercle  chamarré», sorte de moulin-coffre (l’idée  est  conforme  au  mobilier  rustique, sans doute) qui  produit  à volonté  farine  , argent  et  sel.  Bien  enraciné dons dans la réalité de la vie des hommes, le Sampo  s’en  évade par la  langue et  devient le moulin d’abondance par le  truchement  du  moulin  à  paroles ;  on  le trouve , dans nombre  de  variantes  poétiques , à la genèse  même  du  monde, et si  on  avait  gardé  plus que  des débris, les  moissons se seraient faites, sans semailles et  sans bras … On  considère  que le  cycle  poétique  du  Sampo remonte  , au  moins  pour son  origine,  au  IXème siècle   après J.C).

 Sur  Citadelle Les principaux acteurs du Kalevala

(Dieux , héros ou demi-dieux, hommes, esprits  ou divinités  secondaires , animaux, lieux , objets  etc..)

Illustrations du Kalevala






Par  Nicolaï Kochergin

Un  site  où  l'épopée  est  racontée  par l'image  grâce   à  un artiste  talentueux: