lundi 13 juin 2011

Platon Amour et Beauté

William   Blake
L'ancêtre  des jours



Retour à  nos premières amours  !

Entretien de Socrate avec Diotime
( Le Banquet )
"  En ce début  du  mois de  fevrier  ,  en  416 av JC, Agathon vient  de  gagner le  concours des tragédies aux  Lénéennes (Fête civique  et  religieuse  en l'honneur  de  Dionysos).
 Pour  fêter  sa victoire le  poète  convie  ses  amis à participer à  un  banquet. Alors  qu'ils ont  beaucoup  bu la  veille, le  médecin Eryximac les invite  à  abandonner le  vin au  profit  des beaux discours en  l'honneur  du   dieu  Eros.  Le Banquet  de  Platon  rapporte  les  six meilleurs éloges qui  auraient  été prononcés à  cette  occasion et  livre  la conception  platonicienne, et non  platonique de  l'amour.
L'amour platonicien  n'a rie n de platonique.  il est faux de  croire que  Platon aurait  fait l'éloge d'un  amour dénué de  toute  sensualité , d'un amour  sans  sexe.

Dans le  texte  du  Banquet on  découvre une  réflexion  subtile sur  l'amour  dans tout  ce qu'il  a  d'humain, sur  la puissance  du  désir qu'il  suscite ,  sur  la formidable  énergie  qu'il éveille en  nous...."

J'ai  choisi  l'éloge  de Diotime  d'abord parce qu'elle  est  une  femme  quoique  si  peu  "féministe " ou bien  d'un  féminisme  dont  nous  avons  perdu  l'usage , mais  aussi  parce  qu'elle   argumente  sur    l'Idée  selon  laquelle  l'Amour  et  le  Beau  sont   indissociables  ." ce qui  est  beau  est  aimable , seul  le Beau  est  aimable, on  ne peut  aimer  que  ce  qui  est  Beau ..n'est aimable que  celui  qui  a  l'amour  du  Beau ..."

[...]
Voilà, cher Socrate, dit l'Étrangère de Mantinée, quel est le point de la vie où, autant qu'en aucun autre imaginable, il vaut pour un homme la peine de vivre: quand il contemple la beauté en elle-même! Qu'un jour il t'arrive de la voir, alors ce n'est point à la mesure de la richesse comme de la toilette, ni de la beauté dans les jeunes garçons comme dans les jeunes hommes, qu'elle te semblera être: à la mesure de cette beauté dont la vue, à présent, te met hors de toi-même, pour laquelle tu es prêt, et aussi bien que toi beaucoup d'autres encore, pourvu que vous voyiez vos bien-aimés et soyez toujours en leur compagnie, tous prêts à vous passer, au cas qu'il y en eût possibilité quelconque, de manger et de boire, ayant assez par contre de les contempler seulement et de leur tenir compagnie! Quelle idée nous faire dès lors, ajouta-t-elle, des sentiments d'un homme à qui il serait donné de voir le beau en lui-même, dans la vérité de sa nature, dans sa pureté, sans mélange; et qui, au lieu d'un beau infecté par des chairs humaines, par des couleurs, par mille autres sornettes mortelles, serait au contraire en état d'apercevoir, en lui-même, le beau divin, dans l'unicité de sa forme? As-tu idée que ce doive être une vie misérable, celle de l'homme qui regarde dans cette direction-là, qui contemple au moyen de ce qu'il faut l'objet dont nous parlons et qui est en union avec lui? Ne réfléchis-tu pas, dit-elle, que c'est là, là seulement, qu'il lui sera donné, alors qu'il voit le beau au moyen de ce par quoi il est visible, d'enfanter, non pas des images de mérite, attendu que ce n'est pas avec une image qu'il a pris contact, mais un mérite réel, attendu que c'est le réel avec quoi il a pris contact? N'est-ce pas, d'autre part, à celui qui enfante le mérite réel et qui le nourrit, qu'il appartient de devenir cher à la divinité, et, s'il y a homme au monde capable de s'immortaliser, n'est-ce pas à celui dont je parle qu'en reviendra le privilège?


C'est ainsi donc, Phèdre et vous autres, que me parlait Diotime et voilà ce dont, moi, elle m'a convaincu. Maintenant que j'ai été convaincu, j'essaie pareillement de convaincre les autres que, pour l'acquisition de ce bien, difficilement on trouverait à la nature humaine un collaborateur qui vaille plus que l'Amour! Aussi mon opinion déclarée est-elle dès lors, que c'est pour tout homme un devoir de faire grand cas de l'Amour; aussi fais-je pour mon compte grand cas des choses d'amour et sont-elles pour moi un objet tout particulier d'exercice, que je recommande également à autrui; aussi, en tout temps comme aujourd'hui, je célèbre les louanges de l'Amour, de sa force et de sa vaillance, pour autant que j'en suis capable. Et voilà, Phèdre, le discours que tu voudras bien, s'il te plaît, considérer comme une célébration de louanges en l'honneur de l'Amour, après tout, le nom dont il te plaira bien de nommer ce discours, donne-le-lui!»
[...]

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