dimanche 19 février 2012

Lavoir


Lavoir  




Dans un cadre enchanteur, l'eau limpide qui anime le « frais cresson bleu » et étire mollement les longues herbes ondulantes vient baigner les vieilles pierres inclinées de la margelle . Le large toit aux tuiles rouges prodigue généreusement son ombre fraiche ,
Les paves usés résonnent encore du claquement des lourds sabots et des échos des chants joyeux et cadencés qui donnaient du coeur à l'ouvrage
Sur le mur du fond , des traces noircies rappellent les feux dont on tirait les cendres pour blanchir le linge et faisaient bouillir l'eau sous les énormes lessiveuses dans un nuage de vapeurs âcres,
Gros vêtements des travaux des champs, tabliers de ferme ou de travail côtoyaient , de loin, dentelles et linges plus fins,et l'on tirait vigoureusement sur la planche, les grands draps de lin gorgés d''eau qu'on battait avec ferveur
Poésie , charme d'antan , nostalgie d'un temps révolu ,,,

où les femmes les reins brisés , genoux endoloris , doigts gourds , trompaient leur dure condition en chantant mais aussi en cancanant dans cet espace ouvert sur l'intimité exposée, où bien des comptes se réglaient, où la dureté du labeur n'incitait pas toujours à la complaisance , où la faiblesse et les faiblesses étaient jugées sévèrement , ce qui n'empêchait pas sans doute quelques beaux élans de solidarité inspirés par l'effort commun, quelques beaux gestes pour éponger un front humide de lassitude, ou baisser des jupons effrontément retroussés .

Voilà pourquoi , pour toutes mes soeurs je bénis l'invention du lave-linge que je n'échangerais pour rien au monde contre le charme d'un lavoir!

Fevrier 2010

5 commentaires:

  1. Bonjour Emma,

    je suis en accord en tout point avec cette conclusion exprimée dans votre post. C'est même, à mon avis, une des plus grandes inventions du siècle dernier. Le modernisme a du bon lorsqu'il évite des peines et apporte le confort. Et j'ai en mémoire, dans un village où je retrouvais mes grands-parents, l'image de ces lavandières fatiguées avant l'âge, marquées par les difficultés de ce travail.
    Je vous souhaite amie une bonne semaine.

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  2. Merci Charlie pour votre approbation . Les vieilles pierres ont du charme mais il est des traditions auxquelles on peut se réjouir d'avoir échappé . Sans regrets !
    Bonne semaine à vous également !

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  3. Vous écrivez très bien Emma et vous décrivez très bien les charmes d'un temps suranné et les douleurs qui furent. Je bénis pour mes frères la cessation du service militaire et pour mes sœurs l'invention du lavoir. Assister aux flux d'êtres humains à Saint-Lazare, Paris, 8h30 chaque matin, visages creux, yeux vides, fringues Zara fabriquées dans des fabriques esclavagistes en Chine, démarche automatique, incessant flot des pas dans le labyrinthe souterrain, me fait penser que la servitude n'a pas été abolie, loin s'en faut.

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  4. Oh Edith , je pense que nous nous comprenons bien ! Vrai je ne suis pas passéiste et je persiste à croire que le progrés est plutôt globalement positif , Les conditions de vie et surtout celle des femmes en a beaucoup bénéficier .. liberté de paroles , liberté d'écrire , liberté d'accès à la connaissance ... ,quelques progrés non négligeables ... Nous avons supprimé pas mal d'horreurs , mais nous ne les avons pas éradiquées .. c'est vrai nous nous sommes créés d'autres esclavages , nous manquons de vigilance et d'engagement pour préserver bien des acquits au risque de les abandonner à d'autres tyrans , marchés, pub, créateurs de besoins aussi fictifs qu'aliénants sans parler d'autres dictatures de l'esprit ....
    mais le progrès humain n'est pas linéaire , il ne se fait jamais sans luttes , sans allers et retours. Ce sont des vagues qui portent toujours l'incertitude de la marche en avant ou du recul .
    Nous sommes comme ce marcheur qui vise des lignes de crêtes sans voir les abîmes qui s'ouvrent sous ses pas et qu'il doit d'abord franchir .
    Les jours sont moroses , mais j'essaie de me réconforter en pensant à ce que nous avons gagné sans oublier ce que nous avons perdu et pour compenser ce que nous risquons de perdre .

    (Quelques enfants d'hier , devaient parcourir plusieurs km à pieds dans la froidure d'hiver pour se rendre à l'école ... aujourd'hui des lyceens sont obligés de passer quotidiennement 3 voire 4 heures dans le RER parisien , à la merci des incidents mal gérés d'un systeme de transport saturé . Entre les deux nous avions atteint une situation confortable mais nous avons laissé la machine s'emballer ...)Demain peut être nous eviterons le pire et reviendrons au meilleur en diminuant pour tous (travailleurs et lyceens) , les longues heures de trajets à prendre sur leur temps de vie ou de loisir ..
    Vous voyez , je vous lis chaque jour Almasoror ;-))
    Bonne journée

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  5. Merci de venir lire souvent AlmaSoror... Qui vient aussi bien souvent se ressourcer ici.

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