Auteur et réalisateur : Pierre Schoendoerffert , roman 1976 , film 1977
Distribution
Jean Rochefort : Le Pacha
Claude Rich : Pierre le médecin de bord
Jacque Perrin : Willsdorff alias Le Crabe- tambour
Jacque Dufilho : l'officier mécanicienf
Odile Versois et Aurore Clément
Odile Versois et Aurore Clément
Musique Philippe Sarde
Sur le fond des évènements historiques
de la décolonisation
française , guerre d’Indochine jusqu’à
Dien Bien Phu en mai 1954 ,
guerre d’Algérie qui s’est
terminée par le Putsch
d’Alger appelé encore
le Putsch des
généraux en Avril
1961 et à l’issue duquel
De Gaulle déclarera l’indépendance de l’Algérie
, le destin de quelques hommes unis
par leur milieu
social , leurs racines , leurs idéaux et l’amitié
mais que les évènements vont néanmoins
séparer , prisonniers de leurs
convictions personnelles et
des choix auxquels ils sont
les confrontés par les circonstances .
« La
rectitude de nos
choix c’est souvent le choix entre un bien
et un autre bien «
On ne reprochera
pas à P. Shoendoerffer
d’avoir choisi ses
héros dans un
milieu qui est le sien
et pas forcément
le nôtre mais dans
celui-ci , comme ailleurs, les hommes doivent
faire face aux dilemmes
de cette rectitude
du choix quand
il s’agit d’opter entre un
bien et un autre
bien , où la vertu
s’oppose à une autre
vertu : loyauté à
fidélité , courage à pitié, Honneur à
humilité .
La valeur de l’homme
ne se définit pas
par la place que
son destin lui
fixe , par le sort
que les circonstances lui
reservent parfois en le
broyant., mais bien
plutôt par sa résistance et sa
capacité à rester fidèle
à lui-même sans trahir
ses engagements .
Il est difficile
de sortir intact
d’un tel combat et le
compromis tempère le
plus souvent nos ambitions
d’un absolu inaccessible
en lui substituant une retraite
honorable .
L’auteur et
réalisateur Schoendorffer a choisi
pour illustrer ce
drame de l’ ideologie 3 figures humaines
particulièrment significatives
respectables et attachantes
trois hommes de valeur
égale dominés dans le film
par la stature du Pacha, le commandant
du Jauréguiberry admirablement incarné par
Jean Rochefort .
« Je suis déjà mort une fois «
Idéalement puisque dans le film nous ne le voyons que dans ce rôle d’ Officier de la Marine Française à l’existence vouée exclusivement à son commandement , au bateau et à son équipage, mais avant tout à la Marine Française et à la République ( Impossible de ne pas songer à Grandeur et Servitude miltaire de notre grand poète A. De Vigny) , cet homme de devoir et d’orgueil n’ a failli qu’une fois dans sa vie . Et sur cette passerelle du Jauréguberry où i l assure sa dernière mission c’est pour rencontrer la mort une seconde fois et rendre les armes à son juge implacable qu’il vient encore défier dans cet enfer sublime de l’Atlantique Nord .
Pierre (Claude Rich ),
le médecin du bord ,
connait lui aussi
celui qui hante les
bancs de Terreneuve
sur son chalutier devenu
légendaire pour les marins internationaux qui croisent
dans ces eaux
maudites afin d’ assurer
leur subsistance dans
un des plus durs métiers du monde. IL
a peint son
bateau Le Chamrock de Fécamp . Sa proue porte
les yeux des dragons
asiatiques perçant le brouillard
et les brumes qui , en hiver durant le s campagnes de pêche , fondent la mer
et le ciel
dans une grisaille
opaque glaciale et humide chargée de sel
et
d’embruns.
Il a connu Willsdorff , le Crabe-Tambour, au Vietnam
, tous deux amoureux de ce pays
, tous deux convaincus
de leur devoir
et de la légitimité de leur présence
bénéfique, à leurs yeux .
La vraie vie était
là-bas et quand la France
a
dû abdiquer après Dien Bien Phu en 1954, ils avaient
promis de tout
quitter...
« Adieu vieille
europe que le diable
t’emporte «
Mais Pierre n’est
ni parti plus
loin, ni encore moins resté .
Pierre a abandonné le Vietnam
est rentré dans le rang et il a continué
d’exercer sa profession de médecin
militaire là où
la France le lui
commandait .
Il sait aussi
que sa rencontre
avec le Charomk rouvrira quelque blessure d’une
promesse non tenue , i l
devra aussi rendre
des comptes .mais son
role humanitaire
qu’il doit à
sa profession , le
dispense d’amertume sans
gommer pourtant toute la nostalgie d’un
engagement à demi respecté
.
Quel est donc ce diable
au sobriquet de
Crabe-tambour qu’ils redoutent et qu’ils poursuivent ? ….. leur
conscience .
Il avait l’habitude
de porter la sienne
dans ses bras ,
un chat noir dont
il ne se
séparait jamais
« c’est ma conscience
disait - il , vous voyez elle
est noire , mais bien moins jolie à regarder ... et comme vous voyez aussi , elle est incorruptible"
Le charisme dont le pare
Schoendoerffer nous fait penser
à l’un de
ces êtres lumineux qui vous brûlent lorsque vous les approchez
de trop près .
Un Rimbaud , exigeant
, intransigeant , aventurier par soif
de vivre et de tout goûter , mais
brûlant d’un ideal au regard
duquel ils ne supportent
pas de compromis
en particulier lorsqu’il
vous a élu parmi
ses amis .
Le monde est leur monde et ils
dictent leurs règles .Ils exigent
de vous la perfection ,
celle de leur
ideal sous peine de déchéance.
Aveuglés par leur soif d’absolu
ils font
de vos faiblesses
une faute . et peuvent
frapper à mort ceux qui
les aiment .
Ajoutons un dernier acteur omniprésent : la
mer .
La mer dans sa beauté la plus cruelle de l’Atlantique Nord .
C’est dans ce
film que j’ai vu la meilleure representation de
son immensité et de sa puissance . Que
ce soit lorsque l’étrave
du navire fend les lames dans des gerbes
d’ecume , ou quand
la houle soulève mollement
ces énormes masses liquides
alourdies par le gel de l’antartique . Vaste
plaine infinie toujours
en mouvement , ou
deferlantes coiffées d’écume
au-dessus d’abîmes mouvants menaçant le bâtiment
« il souffre « dit
le commandant quand
le fer gémit sous les
coups de boutoirs
.
L’analogie
entre le combat qui
se joue sur l’eau et
les états d’âmes
des protagonistes est trop
évidente pour la commenter
.
Pour l' anecdote , on
verra le
tableau de Van de
Velde si
souvent derrière le
commandant et son livre
de chevet , un livre
de Conrad .
Admirable découverte. Nous attendons les insensés. www.jeunesseoblige.com
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