(1903)
Avec quelle puissance Conrad nous
projette à bord du Nan Shan dans un terrible Typhon de la mer de Chine !
Les éléments se sont déchaînés et s'acharnent sur le navire et sur les
hommes . "dans leur acharnement on
sentait de la haine, de la férocité dans leurs coups "
Le vent couvre les voix , terrasse la volonté "Car
tel est le pouvoir désagrégeant des grands souffles: il isole. Un tremblement
de terre, un éboulement , une avalanche s'attaque à l'homme incidemment pour
ainsi dire et sans colère. L'ouragan lui, s'en prend à chacun comme à son
ennemi personnel, tâche de l'intimider, à le ligoter membre à membre, met en
déroute sa vertu." Les montagnes
d'eau s'écrasent sur le pont, balayant tout , le matériel et les résistances
physiques et morales . Pendant des heures les hommes luttent c'est "l'attente
d'une catastrophe interminablement imminente; le corps aussi s'épuise dans ce
simple raccrochement à l'existence parmi le tumulte excessif; c'est une
lassitude insidieuse qui pénètre dans les poitrines, s'infiltre insidieusement
jusqu'au coeur, l'alourdit et le contriste - ce coeur incorrigible de
l'homme qui, par delà tous les biens de la terre , par delà la vie même,
aspire à la paix" .
Dans ce déchainement titanesque
deux hommes qu'une stature si modeste oppose de façon dérisoire à la
puissance des éléments Pourtant tous deux vont vaincre et même
révéler ce que la force tranquille peut accomplir quand on ne déroge pas au
devoir. Point de drame ou de tragédie; le Nan Shan traversera le cyclone
et ramènera marins et passagers au port. Le Typhon n'aura pris ni homme,
ni honneur . L'exploit sera silencieux , discret comme ce capitaine
Mac Whirr petit homme taciturne mais profondément humain soucieux d'écarter de
ses hommes la déchéance morale que suggère la furie de la nature; discret
aussi comme Jukes le second qui n'aspirant plus qu'à la paix de l'abandon,
risque néanmoins sa vie pour exécuter la volonté de son capitaine et
préserver l'équipage de la sauvagerie ou le navire risque de sombrer.
Simple la dernière phrase du récit
,celle de Jukes parlant de Mac Whirr:
"Pour un homme si court, je
trouve qu'il ne s'en est pas mal tiré "
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