samedi 5 novembre 2016

Pavese : Dialoghi con Leuco


Extraits des Cahiers d'études  romanes  : Les Dialoghi con Leucò de Cesare Pavese,une mythologie fondée sur l’homme

Résumé: 
Les Dialoghi con Leucò sont un exemple significatif de la façon de Cesare Pavese d’entendre le mythe et de s’y rapporter. Rédigés entre 1945 et 1947, année de publication, ces dialogues représentent la proposition de la part de l’auteur d’une mythologie fondée sur l’homme, le seul être qui, gardant en soi la force primordiale du germe mythique, est capable de lutter pour gagner des marges de liberté au-deçà du cercle opprimant du destin. Dans l’intention de créer un antidote aux ravages de la Seconde Guerre mondiale, Pavese parvient à la fois à l’exorcisation de ses propres mythes personnels, en les encadrant dans la Mythologie (grecque et pré-grecque), et à la création d’une allégorie des capacités intrinsèques de l’homme de réaliser sa liberté à travers le souvenir, moyen de connaissance, et la parole. Ainsi la forme dialogique devient l’expression formelle de la philosophie sous-tendue au contenu de Leucò qui promeut le pouvoir salvateur du discours de l’homme vers l’homme.

[...] L’acceptation de fond de la fabula du mythe est aussi révélée par les brèves notes qui introduisent chaque dialogue : le narrateur, qui est vraisemblablement Pavese lui-même, car il n’y a pas d’éléments qui nous amènent à considérer l’auteur et le narrateur comme deux figures distinctes, esquisse le mythe auquel le dialogue fait référence, en faisant des remarques généralement ironiques et de nature métalittéraire, suivies parfois par des observations montrant qu’il croit vraiment aux événements décrits : par exemple, on peut lire à propos du dialogue qui a pour protagonistes Achille et Patrocle (I due), « Superfluo rifare Omero. » (« Inutile de réécrire Homère. »). Mais juste après, considérant la matière du récit – le dialogue en question – comme un événement réellement advenu, le narrateur ajoute : « Noi abbiamo voluto semplicemente riferire un colloquio che ebbe luogo la vigilia della morte di Patroclo. » (« Nous avons simplement voulu rapporter un dialogue qui eut lieu la veille de la mort de Patrocle. »). On se rend donc bien compte que Pavese voulait représenter sur la page écrite sa propre croyance dans les mythes, sa propre aspiration à créer un rapport authentique avec le mythe (à la façon grecque) qui correspondait à l’ambition formelle de créer des “rapports imaginatifs” entre les objets de l’écriture et la réalité proprement dite qu’il choisit de représenter, en éliminant toute ornementation gratuite et tous jeux rhétoriques. Ainsi le choix de s’occuper du mythe s’est présenté comme inévitable : c’était l’initiative nécessaire en ce qu’elle lui a fourni le moyen d’expression idéal pour aboutir à une poétique du symbole..[...]

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Parlano  Achille  e Patroclo 

N'ayant pas trouvé   d'édition  bilingue, la  traduction est  très approximative  mais j'aime  particulièrement  ce  passage   ou  Cesare  Pavese ,   joue  avec  la  nature  du souvenir mise  en  abîme  dans  sa narration du  mythe homérique .

Achille : Patroclo,  perché noi uomini diciamo  sempre  per farci  coraggio : "Ne  ho  visto di  peggio" quando dovremmo dire : "il  peggio verrà. Verrà un  giorno  che  saremo cadaveri" [...] Stasera so  che dopotutto non c'è differenza tra noialtri e  gli  uomini  vile. E questo  peggio  vien  per  ultimo, viene  doppo  ogni cosa , e tu  tappa la bocca come un  pugno  di  terra. E sempre bello  ricordarsi : "Ho visto  questo ,  ho  patito quels'altro" ma  non  è  iniquo che propiri la cosa  più dura non  la  potremo ricordare ?    
Patrocle , pourquoi  nous  les  hommes, disons-nous  toujours  pour nous donner du  courage "N'en  n'avons -nous  pas  connu de pire" quand  nous devrions  dire  "Le  pire est  à  venir, viendra  un  jour où nous serons des cadavres"  . [...] Ce soir   je sais que  après tout  ,  il  n'y a pas de différence entre nous autres   et  les homes lâches . Pour  tous,  il  est quelque  chose de pire  . Et ce pire  vient   à la fin , vient   après toute  chose et te jette   face contre  terre .Et   il  est toujours  bon  de se  rappeler : "J'ai  vu  ceci , j'ai  enduré cela" mais  ,'est-il   pas injuste  que précisément  la chose   la plus dure  nous  ne   puissions  nous en  souvenir ?    
[...]
Patroclo :[...]Achille, quando torneremo in campo ?
[...] Achille  quand  retournerons  nous  au combat?
Achille :Torneremo, sta' certo. Un  destino  ci  aspetta. Quando   vedrai   le  navi   in  fiamme, sarà l'ora.
Nous  y  retournerons sois -en  certain. Le destin  nous  attend. Quand  tu  verras les bateaux en  flammes , ce sera l'heure
Patroclo :   A questo   punto?
A ce moment  ? 
Achille   :  Perche ? Ti  spavetta ?   Non ne hai   visto   di  peggio?
Pourquoi   ?  Tu  as peur  ?   N'en  as-tu  pas  vu  de  pire   ?
Patroclo: Mi mette  la smania. Siamo  qui  per  finirla. Magari   domani .
Je suis impatient Nous sommes ici   pour  en  finir .Demain   peut-être .
Achille: Non  aver  fretta  , Patroclo. Lascia  dire  "domani" agli  dei. Solamente  per  loro   quel  che   è  stato  sarà.
Ne sois pas pressé Patrocle.Laisse  dire  aux dieux "demain" . Seulement pour eux  ce qui  a été sera.
[...]

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