Eugène Isabey: barques échouées sur une plage de Normandie |
Le Corsaire
Je fais la
guerre à Dieu, tout seul. Je suis
corsaire
Dans ce temps sans
blason.
J’ai le poème dans
les bras
Et je me bats pour
le tumulte
Et la folie des villes sombres.
J’ai dans la tête
l’éclair masqué.
Quel contre
Peut encore me
toucher ? Quel jeu de jambes
suivre celui du cœur qui ne veut plus danser.
Au ciel femelle
Mon nom s’est érigé et fait
feu dans la foule.
Je l’ai voulu , j’ai eu
Le monde en corps
à corps
J’ai frappé son
visage et sculpté son délire
Faisant je ne sais quoi d’obscur en
sa manière.
Quel dur travail
le jour pour voir
finir le jour
Et la nuit pour mourir et
naître à la fureur.
Et quel acharnement à
profaner la face
Quelle honte d’avoir
canaille fait jouir
en la frappant d’amour.
Plus nu que
Dieu à l’aube
Je m’en allais, suivant mon
âme
pour voir de grands poissons
morts à l’état sauvage.
Et nous demeurions là
longtemps, par les narines
Aimant le sel, suivant l’iode, le sillage
Imprimé très profond.
Bien plus profond que
cœur de sable
D’amour extrême
quand je fus
Sur le bord de tuer
J’ai entendu la voix
dans la nuit la plus basse
Qui disait : il est temps de demander la
paix.
J’ai demandé. J’ai quitté
les colonnes
En papier des
journaux, du temps, du compte en banque.
Le soir au Large en
remontant
Je retrouve le sel.
Bonheur d’être soutier tout au fond du navire.
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