Eloa
Ou la sœur des anges
(Née d'une larme d'amour ...)
Un des premiers poèmes publiés d’Alfred de Vigny (1825) , une épopée de 778 vers , en trois chants.
Chant I
(Naissance d'Eloa)
Naissance
Il naquit sur la terre un Ange, dans le temps
Où le Médiateur sauvait ses habitants.
Avec sa suite obscure et comme lui bannie,
Jésus avait quitté les murs de Béthanie;
A travers la campagne il fuyait d'un pas lent,
Quelquefois s'arrêtait, priant et consolant,
Assis au bord d'un champ le prenait pour symbole,
Ou du Samaritain disait la parabole,
La brebis égarée , ou le mauvais pasteur,
Ou le sépulcre blanc pareil à l'imposteur;
Et de là poursuivant sa paisible conquête,
De la Chananéenne écoutait la requête,
A la fille sans guide enseignait ses chemins ,
Puis aux petits enfants il imposait les mains .
L'aveugle-né voyait sans pouvoir le comprendre,
Le lépreux et le sourd se toucher et s'entendre,
Et tous, lui consacrant des larmes pour adieu,
Ils quittaient le désert où l'on exilait Dieu.
Fils de l'homme et sujet aux maux de la naissance,
Il les commençait tous par le plus grand , l'absence,
Abandonnant sa ville et subissant l'Edit,
Pour accomplir en tout ce qu'on avait prédit.
______
Or dans ces temps là , ses amis en Judée
Voyaient venir leur fin qu'il avait retardée;
Lazare, qu'il aimait et ne visitait plus,
Vint à mourir , ses jours étant tous révolus.
Mais l'amitié de Dieu n'est-elle pas la vie ?
Il partit dans la nuit ; sa marche était suivie
Par les deux jeunes soeurs du malade expiré,
Chez qui, dans ses périls, il s'était retiré.
C'était Marthe et marie; or Marie était celle
qui versa les parfums et fit blâmer son zèle.
Tous s’affligeaient ; Jésus disait en vain : Il dort
Et lui-même en voyant le linceul et le mort,
Il pleura.- Larme sainte à l’amitié donnée,
Ô vous ne fûtes point aux vents abandonnée !
Des Séraphins penchés l’urne de diamant,
Invisible aux mortels, vous reçue mollement,
Et comme une merveille , au ciel même étonnante,
Aux pieds de l’Eternel vous porta rayonnante.
De l’œil toujours ouvert un regard complaisant
Emut et fit briller l’ineffable présent ;
Et l’Esprit Saint sur elle épanchant sa puissance
Donna l’âme et la vie à la divine essence.
Comme l’encens qui brûle au rayon du soleil
Se change en un feu pur, éclatant et vermeil,
On vit alors du sein de l’urne éblouissante
S’élever une forme et blanche et grandissante,
Une voix s’entendit qui disait : Eloa !
Et l’Ange apparaissant répondit : Me voilà .
Et lui-même en voyant le linceul et le mort,
Il pleura.- Larme sainte à l’amitié donnée,
Ô vous ne fûtes point aux vents abandonnée !
Des Séraphins penchés l’urne de diamant,
Invisible aux mortels, vous reçue mollement,
Et comme une merveille , au ciel même étonnante,
Aux pieds de l’Eternel vous porta rayonnante.
De l’œil toujours ouvert un regard complaisant
Emut et fit briller l’ineffable présent ;
Et l’Esprit Saint sur elle épanchant sa puissance
Donna l’âme et la vie à la divine essence.
Comme l’encens qui brûle au rayon du soleil
Se change en un feu pur, éclatant et vermeil,
On vit alors du sein de l’urne éblouissante
S’élever une forme et blanche et grandissante,
Une voix s’entendit qui disait : Eloa !
Et l’Ange apparaissant répondit : Me voilà .
[...]
Un jour les habitants de l’immortel empire ,
Imprudents une fois s’unissaient pour l’instruire.
« Eloa, disaient-ils , oh !veillez bien sur vous :
Un ange peut tomber ; le plus beau de nous tous
N’est plus ici : pourtant dans sa vertu première
On le nommait celui qui porte la lumière ;
[…]
Mais on dit qu’à présent il est sans diadème,
Qu’il gémit, qu’il est seul, que personne ne l’aime,
Que la noirceur d’un crime appesantit ses yeux ,
Qu’il ne sait plus parler le langage des cieux ;
La mort est dans les mots que prononce sa bouche ;
Il brûle ce qu’il voit, il flétrit ce qu’il touche ;
Il ne peut plus sentir le mal ni les bienfaits ;
Il est même sans joie aux malheurs qu’il a faits.
Le ciel qu’il habita se trouble à sa mémoire ,
Nul ange n’osera vous conter son histoire,
Aucun saint n’oserait dire une fois son nom. »
Et l’on crut qu’Eloa le maudirait ; mais non,
L’effroi n’altéra point son paisible visage,
Et se fut pour le Ciel , un alarmant présage.
Son premier mouvement ne fut pas de frémir,
Mais plutôt d’approcher comme pour secourir ;
La tristesse apparut sur sa lèvre glacée
Aussitôt qu’un malheur s’offrit à sa pensée ;
Elle apprit à rêver, et son front innocent
De ce trouble inconnu rougit en s’abaissant ;
Une larme brillait auprès de sa paupière.
Heureux ceux dont le cœur verse ainsi la première !
Imprudents une fois s’unissaient pour l’instruire.
« Eloa, disaient-ils , oh !veillez bien sur vous :
Un ange peut tomber ; le plus beau de nous tous
N’est plus ici : pourtant dans sa vertu première
On le nommait celui qui porte la lumière ;
[…]
Mais on dit qu’à présent il est sans diadème,
Qu’il gémit, qu’il est seul, que personne ne l’aime,
Que la noirceur d’un crime appesantit ses yeux ,
Qu’il ne sait plus parler le langage des cieux ;
La mort est dans les mots que prononce sa bouche ;
Il brûle ce qu’il voit, il flétrit ce qu’il touche ;
Il ne peut plus sentir le mal ni les bienfaits ;
Il est même sans joie aux malheurs qu’il a faits.
Le ciel qu’il habita se trouble à sa mémoire ,
Nul ange n’osera vous conter son histoire,
Aucun saint n’oserait dire une fois son nom. »
Et l’on crut qu’Eloa le maudirait ; mais non,
L’effroi n’altéra point son paisible visage,
Et se fut pour le Ciel , un alarmant présage.
Son premier mouvement ne fut pas de frémir,
Mais plutôt d’approcher comme pour secourir ;
La tristesse apparut sur sa lèvre glacée
Aussitôt qu’un malheur s’offrit à sa pensée ;
Elle apprit à rêver, et son front innocent
De ce trouble inconnu rougit en s’abaissant ;
Une larme brillait auprès de sa paupière.
Heureux ceux dont le cœur verse ainsi la première !
[…]
Eloa s’écartant de ce divin spectacle,
Loin de leur foule et loin du brillant Tabernacle,
Cherchait quelque nuage où dans l’obscurité
Elle pourrait du moins rêver en liberté .
Les Anges ont des nuits comme la nuit humaine.
Il est dans le ciel même une pure fontaine ;
[…]
Mais en vain Eloa s’abreuvait de son onde,
Sa douleur inquiète en était plus profonde ;
Et toujours dans la nuit un rêve lui montrait
Un ange malheureux qui de loin l’implorait.
[…]
Eloa s’écartant de ce divin spectacle,
Loin de leur foule et loin du brillant Tabernacle,
Cherchait quelque nuage où dans l’obscurité
Elle pourrait du moins rêver en liberté .
Les Anges ont des nuits comme la nuit humaine.
Il est dans le ciel même une pure fontaine ;
[…]
Mais en vain Eloa s’abreuvait de son onde,
Sa douleur inquiète en était plus profonde ;
Et toujours dans la nuit un rêve lui montrait
Un ange malheureux qui de loin l’implorait.
[…]
L’Ether a ses degrés d‘une grandeur immense ,
Jusqu’à l’ombre éternelle où le Chaos commence .
[…]
Jusqu’à l’ombre éternelle où le Chaos commence .
[…]
Jamais les purs Esprits, enfants de la lumière,
De ces trois régions n’atteignent la dernière.
Et jamais ne s’égare aucun beau Séraphin
Sur ces degrés confus dont l’Enfer est la fin.
[…]
Péril plus grand ! peut-être il lui faudrait entendre
Quelque chant d’abandon voluptueux et tendre ,
Quelque regret du Ciel, un récit douloureux
Dit par la douce voix d’un Ange malheureux.
Et même, en lui prêtant une oreille attendrie,
Il pourrait oublier la céleste patrie,
Se plaire sous la nuit et dans une amitié
Qu’auraient nouée entre eux les chants et la pitié.
Et comment remonter à la voûte azurée,
[…]
__________
Voilà pourquoi, toujours prudents et toujours sages,
Les Anges de ces lieux redoutent les passages.
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De ces trois régions n’atteignent la dernière.
Et jamais ne s’égare aucun beau Séraphin
Sur ces degrés confus dont l’Enfer est la fin.
[…]
Péril plus grand ! peut-être il lui faudrait entendre
Quelque chant d’abandon voluptueux et tendre ,
Quelque regret du Ciel, un récit douloureux
Dit par la douce voix d’un Ange malheureux.
Et même, en lui prêtant une oreille attendrie,
Il pourrait oublier la céleste patrie,
Se plaire sous la nuit et dans une amitié
Qu’auraient nouée entre eux les chants et la pitié.
Et comment remonter à la voûte azurée,
[…]
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Voilà pourquoi, toujours prudents et toujours sages,
Les Anges de ces lieux redoutent les passages.
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C’était là cependant , sur la sombre vapeur,
Que la vierge Eloa se reposait sans peur :
Elle ne se troubla qu’en voyant sa puissance,
Et les bienfaits nouveaux causés par sa présence.
[…]
Que la vierge Eloa se reposait sans peur :
Elle ne se troubla qu’en voyant sa puissance,
Et les bienfaits nouveaux causés par sa présence.
[…]
(extraits chant I du vers 1 à 324 )
Ce qui frappe quand même dans la "Vénus"... c'est son regard ( abstrait);.. elle ne fixe rien, semble indifférente à son entourage...
RépondreSupprimercette attitude hiératique est sans doute pour beaucoup dans la célébrité de cette peinture... sans doute était-ce une façon "obligée " de l'époque, car on a aussi cette impression chez Piero Della Francesca
Ce regard semble en effet fixé sur un au-delà perdu ou inaccessible . On le retrouve souvent chez Botticelli. N'est-ce pas aussi celui de Flore ou Simonetta Vespucci (selon les théories)dans l'allégorie du printemps , de la Madone à la Grenade , de Pallas etc....Il est bien possible qu'il symbolise l'éphémère de la beauté , des plaisirs de ce monde, en particulier dans ces deux grandes oeuvres chargées de mélancolie en dépit des motifs heureux utilisés dans les tableaux .
RépondreSupprimerNote que dans la Vénus on ignore si Flore dévoile la perfection ou s'efforce de la voiler .
Il est rare que les personnages de Botticelli nous interpellent directement Mais c'est peut être effectivement conventionnel , une communication indirecte entre l'opinion personnelle de l'artiste et son spectateur .