Ravel Ondine parMartha Argerich
"Ecoute ! Ecoute ! - C'est moi , c'est ondine qui frôle de
ces gouttes d'eau les lozanges sonores de ta fenêtre illuminée
par les mornes rayons de la lune ; et voici, en robe de moire,
la dame chatelaine qui contemple à son balcon la belle nuit
étoilée et le beau lac endormi.
Chaque flot est un ondin qui nage dans le courant, chaque
courant est un sentier qui serpente vers mon palais, et mon
palais est bâti fluide, au fond du lac, dans le triangle du feu ,
de la terre et de l'air.
" Ecoute ! Ecoute ! - Mon père bat l'eau coassante d'une
branche d'aulne verte, et mes jours caressent de leurs bras
d'écume les fraîches îles d'herbes, de nénuphars et de glaïeuls
ou se moquent du saule caduc et barbu qui pêche à la ligne."
Sa chanson murmurée, elle me supplia de recevoir son anneau
à mon doigt, pour êtrre l'époux d'une ondine, et de visiter avec
elle son palais, pour être le roi des lacs.
Et comme je lui répondais que j'aimais une mortelle,
boudeuse et dépitée, elle pleura quelques larmes, poussa un
éclat de rire, et s'évanouit en giboulées qui ruisselèrent
blanches le long de mes vitraux bleus.
Aloysius Bertrand Gaspard de la nuit
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