Une expérience du sublime
Face au désert
Lorsqu’on découvre le désert, que le regard embrasse sa vaste étendue, qu’elle soit de sable ou de chaos rocheux , les impressions qui prédominent sont elles liées au vertige d’un horizon infiniment lointain, au silence ou bien à l’immobilité ?
N’ayant pas été moi-même confrontée au désert ,je ne peux qu’imaginer , au travers de mes lectures , des films, des photos et j’en déduis à tort ou à raison , que toutes ces impressions doivent se superposer, se mêler, pour créer ensemble cette atmosphère sacrée qui envoûte , force l’admiration, tout en en inspirant le respect et la crainte.
De tous ces états si incompatibles avec l’être humain , celui de l’immobilité est peut-être le plus fort ou du moins le plus étrange , le plus caractéristique du désert .
L’homme est par principe mouvement et ici tout semble figé. Tout ce qui bouge en est absent : hommes, bêtes, herbes, feuillages , jusqu’au ciel sans nuage. Le soleil lui-même semble avoir arrêté sa course tant sa chaleur implacable étire les heures durant lesquelles il brûle.
Dans le désert les ennemis que l’homme affronte sont immobiles et lui aussi économise ses gestes, et ses paroles.
Absence de mouvement , absence de bruit , la solitude se révèle par l’unique source de ce qui vient rompre l’immobilité et le silence , celle de l’homme qui marche dans le désert.
Et le temps également lui échappe , il n’est plus à sa mesure comme si le sien et celui du milieu qui l’environne étaient différents. Que signifie à son horloge les traces laissées par les eaux qui ont creusé il y a si longtemps ces profonds canyons aujourd’hui arides ? la lente érosion qui a poli les roches ? le déplacement non perceptible des immenses dunes ?
La perte de ces repères habituels doit provoquer chez le marcheur qui l’affronte pour la première fois une sorte de vertige , certains parlent d’ivresse pour l’ajouter aux mirages .
Alors que cherche l’homme dans ces conditions aussi inhospitalières ? qu’est-ce qui l’attitre ?
Passons sur la nécessité : la route des caravaniers, les champs pétrolifères , l’or noir ou le blanc ( le sel) .
Le commerce a du souvent composer avec le désert Avec ces grands marchés où s’achevaient la route des caravanes déversant leurs trésors venus des confins du monde , il est possible qu’il ait fait jaillir dans notre imaginaire cette source de nos enchantements pour séduire nos différents penchants, le mystique comme l’aventurier , l’ascète comme le chasseur de trésors .
Antinéa de Pierre Benoît , Lampe merveilleuse d’Aladin, météorite de Théodore Monod, la rose bleue des sables continue de nous hanter pour nous pousser à franchir les portes qu’on ouvre par un Sésame.
Mais au-delà du merveilleux , c’est sans doute la promesse d’une quête qui lie l’homme au désert , l’espoir de s’y retrouver soi-même autant que l’espérance de découvrir l’oasis au milieu des sables .
C’est aussi par l’effort qu’il exige pour le braver, la démonstration de la confiance de l’homme en ses capacités, sa prédisposition irréductible à l’espérance.
( sur Citadelle 2006 )
Gerry (2002)- Trailer
(La séquence video hélas ne rend pas compte suffisamment de ce sentiment du sublime communiqué par les merveilleuses images du film de Gus Van Sant associées à la musique d'Arvo Pärt " Spiegel im Spiegel " qu'on a déjà retrouvée dans le Miroir de Tarkovsky )
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