Goerges Duhamel Pierrot le fou
Les Caprices de Marianne
Alfred de Musset
(la tirade d'Octave)
Octave : Figure-toi un danseur de cordes , en brodequins d'argent, le balancier au poing, suspendu entre le ciel et la terre; à droite et à gauche, de vieilles petites figures racornies, de maigres et pâles fantômes , des creanciers agiles, des parents et des courtisans , ;toute une légion de monstres se suspendent à son manteau et le tiraillent de tous côtés pour lui faire perdre l'équilibre ; des phrases redondantes , de grands mots enchâssés cavalcadent autour de lui ; une nuée de prédictions sinistres l'aveugle de ses ailes noires . Il continue sa course légère de l'orient à l'occident. S'il regarde en bas , la tête lui tourne ; s'il regarde en haut, le pied lui manque.Il va plus vite que le vent , et toutes les mains tendues autour de lui ne lui feront pas renverser une goutte de la coupe joyeuse qu'il porte à la sienne, voilà ma vie mon cher ami ; c'est ma fidèle image que tu vois.
Coelio : Que tu es heureux d'être fou !
Octave : que tu es fou de n'être pas heureux ! Dis-moi un peu, toi, qu'est-ce qui te manque ?
Coelio : il me manque le repos , la douce insouciance qui fait de la vie un miroir où tous les objets se peignent un instant et sur lequel tout glisse. Une dette pour moi est un remords . L'amour, dont vous faites un passe-temps trouble ma vie entière . O mon ami , tu ignoreras toujours ce que c'est qu'aimer comme moi ! Mon cabinet d'études est desert ; depuis un mois j'erre autour de cette maison la nuit et le jour. Quel charme j'éprouve au lever de la lune, à conduire sous ces petits arbres, au fond de cette place, mon coeur modeste de musiciens, à marquer mooi-même la mesure , à les entendre chanter la beauté de Marianne ! Jamais elle n'a paru à sa fen^tre; jamis elle n'est venue appuyer son front charmant sur sa jalousie .
Funambule de Marie Laure Flaive |
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