dimanche 16 octobre 2011

Khalil Gibran, Le chant de la vague

Khalil  Gibran


LE CHANT DE LA VAGUE

Le rivage et moi sommes deux amants que la passion rapproche et que l 'air sépare. Je viens d'au-delà de l'horizon azuré mêler l'argent de mon écume avec l'or de son sable et rafraîchir de ma salive l'ardeur de son coeur.

A l 'aube , je récite les canons de l'amour passionnel aux oreilles de mon bien-aimé et il me serre contre sa poitrine . Le soir , je fredonne la prière du désir ardent et il me couvre de baisers.

Je suis insistante et impatiente alors que mon bien-aimé est un allié de la patience et un associé de l 'endurance.

Quand vient la marée haute j'étreins mon bien-aimé , et quand la marée basse la suit , je m'agrippe à ses pieds.

Que de fois ai-je dansé autour des sirènes , quand elles sortaient des abysses pour s'asseoir sur les rochers et contempler les étoiles! Que de fois j'ai entendu un amant se plaindre de son amour passionnel pour une belle créature et l'ai-je aidé à se soulager par des soupirs! Que de fois ai-je câliné les rochers alors qu'ils restaient inertes et que de fois les ai-je chatouillés en éclatant de rire et pourtant ils n'esquissaient aucun sourire !Que de fois ai-je arraché aux abysses des corps qui se noyaient et les ai-je ramenés au monde des vivants! que de fois ai-je volé des perles aux profondeurs pour les offrir à des déesses de beauté!

Dans la quiétude de la nuit , quand les créatures enlacent le fantôme du sommeil , je reste éveillée tantôt en chantant et tantôt en soupirant . Pitié, la veille m'a éreintée ! Toutefois je suis amoureuse et l'amour véritable se reconnaît par la veille .

Telle est ma vie , et tant que je vivrai , ainsi je resterai .

LARME ET SOURIRE , CHANTS
Khalil  Gibran

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