lundi 19 septembre 2011

Petrarque et Lamartine



Petrarque   vu par  Lamartine 
(Posface de  l'Edition  Orphée:  La vertu  et la  grâce)

""...Aucun hommage cependant   n'a été  mieux marqué , aucune  filiation spirituelle plus  affirmée que  celle  de Lamartine...."

Pétrarque  : son  amour , ses livres  et  ses   vers 


"Il y a deux amours : l'amour  des sens  et l'amour  des âmes.  Tous les dux  sont dans l'ordre de la  nature,  puisque la perpétuité de la race  humaine a été attachée à cet  instinct dans les  êtres  vulgaires et à ce  sentiment  dans les êtres d'élite. En cherchant bien  la  différence esssentielle   qui  existe entre  l'amour  des sens  et l'amour  des âmes,  on  arrive  à  conclure  ceci :  C'est  que l'amour des sens à pour mobile et pour  objet le plaisir, et  que l'amour  des âmes  a pour  mobile et  pour   objet la passion  du  beau;  ainsi le premier n'inspire-t-il que  des  désirs  ou  des appétits, et le  second  inspire-t-il   des admirations, des enthousiasmes et pour  ainsi  dire des cultes. Il  y a  plus,  l'amour  des sens inspire souvent  des  vices  et  des  crimes, l'amour  des  âmes  inspire  souvent  des chefs-d'oeuvres et des  vertus: C'est  ainsi  que vous voyez  dans l'antiquité l'amour sensuel   caractérisé  par  Hélène, Phèdre,  Clytemnestre ; et que  vous  voyez dans les temps modernes l'amour  des âmes  se caractériser   dans la  chevalerie, dans  Héloïse, dans  Laure , par l'héroïsme , par la fidélité, par la sainteté  même la  plus idéale  et  la  plus mystique (...)
Cet amour  des  âmes ou cette passion  du  beau, sentiment  qui  se  rapproche le plus du  pieux enthousiasme pour la beauté  incréee, devait par sa nature même  inspirer çà la terre sa  plus céleste poésie , car ce sentiment  est une  sorte de piété par  reflet ; piété qui  traverse la  créature comme un rayon  traverse l'albâtre pour s'élever  jusqu'àla contemplation infinie, Dieu.

Cette  pité transpire   dans les vers de l'amant  de Laure , Laure pour lui n'est pas une femme  , c'est une incarnation  du  beau, dans laquelle il  adore la divinté de l'amour  ....
Quant  à moi , je  considère  Petrarque   , sans  aucune  comparaison possible, comme le plus  parfait poète de l'âme de  tous  les  temps  et  de  tous les pys, depuis la mort  du  doux  Virgile....Toutes les  vagues de  l'Adriatique , toutes les collines de l' Arquà, toutes les grottes de Vaucluse, toutes les brises d'Italie, roulent  avec les larmes  ou les soupirs des amants  un vers de  Pétrarque. Ses sonnets  sont les  médailles du  coeur   humain  (...)
A dater  de  l'heure  où il vit  Laure , l'âme  de Pétrarque ne fut plus  qu'un  chant  d'enthousiasme, de désir, d'amour  de  regrets consacrée  à  cette  vision . Elle  était pour lui   la Béatrice  du  Dante  sortie  de l'enfance et du  rêve et  arrivée  à la réalité de laperfection de la beauté .   Cette publicité  de  culte  n'offensait  ni  la vertu de son idole ni la susceptibilité de son  époux. Laure  était  au-dessus de  tout  soupçon Hughes de  Sades   au-dessus  de la jalousie  . Un  tel  amour divinisé par  de  tels vers  était, à cette  époque , une gloire  et non un  affront pour  la famille...."

La retraite  de  Pétrarque   à  Fontaine  de Vaucluse  :

"Combien  de  fois  pendant  les nuits  d'été , à la  douzième  heure, après  avoir  récité  mon  bréviaire, je suis  allé  me  promener dans les montagnes  au clair  de la  lune.! Combien de fois même  suis-je entré seul , malgré les ténèbres intimidantes de  la  nuit, dans cet antre  terrible où,  le jour  même, et  en compagnie  d'autres  hommes , on  ne pénètre sans un  secret  saisisissement! J'éprouvais  une sorte  de plaisir en y  entrant ; mais je  l'avoue ce plaisir  n'était pas sans une certaine  voluptueuse  terreur.
Je trouve  tant  de  douceur  dans  cette  solitude, une si  douce  tranquillité,  qu'il  me  semble  n'avoir  véritablement  vécu que  pendant le  temps  que  je l'ai  habitée; tout le  reste de ma vie n'a été  qu'un  continuel  tourment. "

Son amours,  ses  livres  et  ses  vers  suffisaient  à sa vie Voici  comment il  parle  à  ces  amis mondains, qui  lui  reprochaient  sa fuite du  monde  :
" Ces  gens  là regardent les plaisirs   comme le  souverain  bien; ils ne comprennent pas qu'on  puisse y  renoncer . Ils  ignorent mes ressources J'ai  des amis dont la   société est  délicieuse pour moi. Mes livres  ce sont  des gens de tous les pays   et  de tous les  siècles  : distingués à la  guerre ,  dans la robe  et dans les lettres; aisés  à vivre , toujours  à  mes ordres; je les fais  venir quand je  veux, et je les   renvoie de  même;  ils  n'ont  jamais  d'humeur  et répondent  à  toutes mes questions.
 Les uns  font  passer en  revue  devant  moi,  les évènements des siècles passés; d'autres me  dévoilent les secrets de la  nature; ceux-ci  m'apprennent à  bien vire  et à  bien  mourir, ceux-là  chassent  l'ennui  par leur  gaîté, et m'amusent par leur  saillies;  il  y en  a  qui  disposent  mon  âme à  tout  souffrir, à ne  rien  désirer, et me  font  connaître à  moi-même. En  un mot  ils m'ouvrent  la  porte  de tous les arts  et  de toutes les sciences ;  je les trouve dans tous mes besoins.
Pour  prix de  si  grands  services ils ne demandent qu'une chambre bien  fermée  dans un coin de ma  petite maison, où ils soient   à l'abri  de leurs ennemis. Enfin,  je les mène  avec moi dans les champs, dont le  silence convient  mieux  que le tumulte des cités."

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